Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 0

Le bâtiment des premiers gouverneurs et missionnaires de Hong Kong va être revalorisé

Missions Françaises de Hong KongMissions Françaises de Hong Kong
Wikimedia Commons
Écrit par Claudia Delgado
Publié le 28 octobre 2021, mis à jour le 28 octobre 2021

Perché sur un mur de granit au-dessus de Queen’s Road, le bâtiment en brique rouge est difficile à manquer lorsqu’on traverse Central. Il détonne parmi les tours modernes du quartier d'affaires mais sa présence demeure encore imposante sur le promontoire de Government Hill, où il surplombait jadis la baie, aujourd’hui cachée par les gratte-ciels.

Situé à Battery Path, le bâtiment se dresse sur l’une des plus anciennes parcelles de terre continuellement occupées de Hong Kong, développée pour la première fois un an après l’arrivée des Britanniques sur l’île. Bien qu’on lise sur sa façade «1917», l'édifice a été originalement construit en 1842 sous le nom de Johnston House. Il a accueilli des gouverneurs coloniaux, des diplomates russes, des missionnaires français et des juges, chacun emblématique d’une partie de l’histoire du bâtiment.

Missions Françaises à Hong Kong
photo@Claudia Delgado

Maison de gouverneurs et de magnats à Hong Kong

Le site a été acquis par Alexander Johnston, premier administrateur de Hong Kong, en 1841. L’un de ses devoirs était de vendre des terres aux hommes d’affaires et il s’est octroyé un terrain sur cet emplacement privilégié pour bâtir sa maison. Lorsque Pottinger, premier gouverneur britannique de Hong Kong arrive sur le territoire en 1843, il loge également à Johnston House.

Lors du mandat de Pottinger, Hong Kong devient le port le plus important du commerce de l'opium en Chine. Alors que la population de Hong Kong explosait, le crime devient endémique, tant et si bien qu’un journal local conseillait aux gens de «dormir avec un pistolet chargé sous leurs oreillers». Même le gouverneur en a été victime, le 26 avril 1843, Johnston House est cambriolée. Pottinger quitte Hong Kong en 1844.

Maison des premiers gouverneurs de Hong Kong
Johnston House en 1860

Son successeur John Francis David n'y habite que peu de temps avant de déménager sur Caine Road. La maison change plusieurs fois de propriétaires. Le troisième occupant fut la firme Augustine Heard and Co et plus tard, la maison sert également de consulat de Russie pendant une courte période. Un 1879, Emanuel Raphael Belilios un magnat qui avait fait fortune dans l’opium, rachète et rebaptise le bâtiment «Beaconsfield» en l’honneur du Premier ministre britannique Benjamin Disraeli comte de Beaconsfield. Au fil des années les résidents rénovent chacun à leur tour le bâtiment, entre 1860 et 1870 un troisième étage et une tour viendront s’ajouter et l’aspect de la façade change plusieurs fois.  

parade militaire à Hong Kong
Cathédrale St. John et Johnston House en 1870

Missions Étrangères de Paris à Hong Kong

L’édifice tel qu’on le connaît maintenant a été construit sur les fondations de la structure précédente lorsque les missionnaires français des Missions Étrangères de Paris l'achètent en 1915 pour en faire leur centre administratif ou procure. Le bâtiment subit une rénovation majeure, pendant laquelle on ajoutera une chapelle surmontée d’une coupole. L’ensemble est reconstruit et agrandi par le bureau d'architectes Leigh & Orange, entreprise responsable, entre autres, du hall principal de l’Université de Hong Kong, de l’église St. Andrew’s et du Dairy Farm Depot qui abrite aujourd’hui le Fringe Club et le FCC.

 

Missions Françaises Hong Kong
photo@Claudia Delgado

 

La procure, qui est bâtie en granit et en briques rouges dans le style néo-classique, ouvre ses portes en 1917, date qui figure encore à l’entrée du bâtiment.

L’immeuble s’appelle «Former French Mission Building», non pas parce que ses occupants y ont séjourné le plus longtemps, mais parce qu’ils ont complètement remodelé l’ancienne maison Johnston en y laissant leur empreinte même après leur départ.

Occupation japonaise à Hong Kong

Il n’est pas clair ce que les Japonais ont fait du bâtiment pendant leur occupation de Hong Kong (1941-1945), mais après la guerre, le gouvernement a commencé à l’utiliser comme un quartier général provisoire, puis comme un foyer temporaire pour la Cour suprême, qui avait été converti en quartier général pour les Kenpeitai, la police militaire du Japon.

Missions Françaises Hong Kong
photo@Wikimedia Commons

En 1952, le gouvernement achète le bâtiment aux Missions étrangères françaises et commence à l’utiliser pour divers services de la fonction publique. Il a été d’abord utilisé par le ministère de l’Éducation entre 1953 et 1967. En 1968, il a été transformé en palais de justice, utilisé d’abord par la Cour du district de Victoria, puis la Cour suprême.

En 1989 il a été déclaré monument historique et en 1997, le bâtiment a dû être transformé afin d’abriter la Cour d’appel finale. L’aménagement a comporté l’ajout d’équipements de sécurité et anti-incendies, d’un système téléphonique et de climatisation ainsi que la construction d’un ascenseur. Puisqu’il s’agit d’un immeuble historique, le Conseil Consultatif des Antiquités a veillé à ce que le réaménagement soit conforme à la conception originale du bâtiment. Architectes et ingénieurs se sont creusés les méninges afin trouver la juste mesure entre praticité et conservation, une tâche ardue lorsqu’il s’agit de la rénovation d’un site historique où aucun changement structurel n’est autorisé.      

Missions Françaises Hong Kong
photo@amo.gov.hk

Malgré son statut de bâtiment historique lui conférant une protection juridique contre la démolition, en 2010, le gouvernement propose de réaménager une partie de Government Hill, qui comprenait Battery Path, la cathédrale St. John’s, les anciens bureaux du gouvernement central et l’ancien édifice des Missions françaises. Soucieux du patrimoine, beaucoup ont condamné ce projet qui détruirait l’intégrité historique des lieux. Le gouvernement a abandonné les plans de réaménagement et a décidé de faire de Government Hill un pôle pour le secteur juridique.

Bien que le bâtiment ait subi plusieurs modifications à chaque changement de propriétaire et d’usage, de nombreux éléments originaux sont restés intacts, tels que la cour et la salle du rez-de-chaussée avec ses colonnes ornées, son escalier en bois et son plafond voûté.

Missions Françaises Hong Kong
photo@Claudia Delgado

Projet de revitalisation 

En 2011, il a été décidé qu’après le déménagement de la Cour d’appel finale, le bâtiment serait disponible pour «une réutilisation adaptative la plus appropriée en temps voulu». Depuis 2015, lorsque la cour est retournée à son emplacement d’origine (utilisée pour le Conseil législatif depuis 1985) l’édifice reste vacant.

En 2016, le Ministère de la Justice a déposé un projet de conversion de l’ancien bâtiment des Missions françaises afin d’accueillir des organisations juridiques. Dans le but de mettre en valeur les éléments architecturaux et patrimoniaux, le projet vise à restaurer le bâtiment comme à l’époque de son troisième réaménagement, lorsqu’il abritait la procure française. Sur la base des documents disponibles datant de 1919, le bâtiment retrouvera son atmosphère d’origine. A l’intérieur, l’histoire de la Cour d’appel finale sera exposée afin de mieux comprendre l’importance culturelle du bâtiment.

Sujets du moment

Flash infos