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CINE - Interview de Kearen Pang pour "29+1"

Kearen Pang - réalisatrice de 29+1Kearen Pang - réalisatrice de 29+1
Kearen Pang
Écrit par Arnaud Lanuque
Publié le 18 mai 2017, mis à jour le 18 février 2021

Kearen Pang a passé la majeure partie de sa carrière dans le monde du théâtre hongkongais. En 2005, elle livre 29+1, un spectacle sur l'étape de la trentaine chez les femmes hongkongaises, qu’elle écrivit et interpréta. Succès publique et critique, il fut joué pendant plusieurs années d’affilée. Son adaptation en film est sa première réalisation. Rencontre.


Lepetitjournal: 29+1 est avant tout une pièce de théâtre. Comment l’avez-vous conçue ?

Kearen Pang: J’avais travaillé dans une compagnie de théâtre pendant 5 ans et je voulais écrire quelque chose pour moi. J’ai visé un spectacle à très petite échelle puisque je savais que je n’aurais pas beaucoup de budget. J’approchais de la trentaine à ce moment-là et mes amies n’arrêtaient pas de parler qu’il fallait qu’elles trouvent un mari rapidement… Je me suis donc dit que cela ferait un bon sujet.  


Comment est venue l’idée d’en faire un film ?

J’ai la chance de connaitre quelques personnes dans l’industrie cinématographique. J’ai eu la chance de collaborer avec Edmond Pang et d’élargir mon cercle de connaissances dans le milieu. Et ils ont commencé à m’inviter sur différents projets. Mais je voulais me concentrer sur ma propre production. Donc, quand j’ai fini par jouer 29+1, j’ai invité des gens de l’industrie à le voir. Et ils me disaient tous que je devrais en faire un film, qu’il marcherait bien parce que toutes les femmes ont peur de la trentaine. Je me suis demandé qui pouvait interpréter les deux personnages. Je connais Chrissie depuis longtemps, je savais qu’elle serait très bien pour interpréter Christy mais je n’étais pas sûre qu’elle pourrait s’en sortir avec l’autre. 

 


Parce qu’à l’origine vous vouliez que la même actrice joue les deux personnages ?

Oui, comme c’est le cas au théâtre. Sur scène, vous mettez des lunettes et vous êtes quelqu’un d’autre. Mais cela ne marche pas de la même façon au cinéma. Cela a été le déclic. Et Joyce Chen m’est naturellement venue en tête. 


Comment avez-vous procédé au travail d’adaptation de la pièce en un film ?

Les gens viennent voir le film parce qu’ils aiment l’histoire originale. Et le fait d’utiliser deux actrices différentes me semblait être un changement suffisamment important pour ne pas en rajouter.  Ça ne m’a pas posé de difficultés particulières en matière d’écriture mais le script une fois terminé n’était pas forcément comme l’équipe en a l’habitude. J’ai du discuter beaucoup avec chacun d’entre eux pour être sûr qu’ils aient bien compris ce que je voulais. 


Est-ce que 29+1 possède de nombreux éléments biographiques ? 

L’essence des personnages vient de mes propres expériences. Quand j’étais à Paris, j’ai emménagé chez une Taïwanaise qui sous-louait son appartement. J’ai lu les livres qui étaient sur ses étagères, j’ai écouté ses CDs, j’ai dormi dans son lit. Ça a été mon inspiration. J’ai inventé pas mal d’éléments, mais, comme j’ai dit, l’essence des personnages vient de moi, je peux être sérieuse comme Christy ou très puérile comme Joyce. Quand vous écrivez pour vous pour la première fois, vous voulez montrer ce dans quoi vous excellez. Je voulais montrer que je pouvais être jolie ou laide et exprimer l’attachement particulier que j’ai envers Paris.

 

29+1 affiche du film



Comment expliquez-vous l’énorme pression sociale qui pèse sur les jeunes femmes hongkongaises ? 

Paradoxalement, je n’ai jamais ressenti cette pression mais j’en étais consciente à travers mes amies. Je ne comprends pas vraiment pourquoi nous sommes censés nous marier avant 30 ans. Je ne sais pas ce qu’il en est en Europe ou aux Etats-Unis mais c’est indéniablement une pression à Hong Kong. C’est triste mais les choses semblent s’améliorer un peu aujourd’hui. La ville est un peu étrange, les valeurs y sont déformées. Les gens normaux, même ceux qui travaillent dans l’industrie culturelle, voient comme objectif principal le succès financier, car nous devons faire avec les conditions de vie locales. Tout le monde veut vivre dans un endroit convenable. Les gens cherchent le moyen le plus rapide d’accumuler de l’argent. C’est pour ça que certaines femmes se concentrent sur la recherche d’un mari riche. Et pour y arriver, vous devez être jeune. C’est comme ça à Hong Kong.


Vous n’avez pas d’expérience technique en matière de cinéma. Comment avez-vous géré cet aspect ?

Quand j’ai signé le contrat pour le film, je voulais avoir des gens dont j’étais sur de leur compétence. Jason Kwan était le directeur photo que je voulais. J’ai été le voir quand il tournait à Macao pour le convaincre de rejoindre le film. Il était toujours occupé et me disait de prendre quelqu’un d’autre mais j’ai tenu ma po sition et ai dit que j’étais prêt à attendre le temps qu’il faut pour qu’il soit disponible. Mon obstination a fini par payer (rires). 


De combien de jours de tournage disposiez-vous ? 

19. Avec de très longs horaires de travail. Ça n’a pas été facile pour l’équipe. Ils n’en pouvaient plus à la fin. Et forcément, cela impacte la qualité finale de l’œuvre. Mais c’est comme ça à Hong Kong… C’est assez triste de les voir se donner autant pour si peu en retour. Seuls les grands noms de la profession, comme Ann Hui, peuvent avoir des tournages confortables à plus de 70 jours. 


Combien de temps a pris le tournage à Paris?

2 jours. C’était très court mais, étant une nouvelle réalisatrice, je ne pouvais pas vraiment demander plus.


Vous avez étudié pendant plusieurs mois à Paris. Quelle influence ce séjour dans la capitale française a eu sur vous ?

Ça a été l’occasion de me connaître davantage. J’ai rencontré une excellente professeure qui m’a beaucoup inspirée. J’y ai été pour apprendre le mime et l’expression corporelle. Mais mon séjour a été trop court pour que je change drastiquement. De retour à Hong Kong, c’est tout de même resté en moi, cela m’a fait voir les choses différemment. C’est à ce moment-là que j’ai pris la décision de faire uniquement des choses qui m’intéressaient pleinement, de privilégier la qualité à la quantité.

 

Propos recueillis par Arnaud Lanuque. Remerciements Hilda Lam. 

Maquillage: Angel Mok. Coiffure: Jo Lam @ Private I Salon. Lieu : HMV Kafe.

 

Arnaud Lanuque
Publié le 18 mai 2017, mis à jour le 18 février 2021

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