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PAROLE AUX APPRENTIS FRANCOPHONES – "De quelle nationalité vous sentez-vous la plus proche?"

Écrit par Lepetitjournal Ho Chi Minh Ville
Publié le 29 novembre 2016, mis à jour le 7 janvier 2018

Lepetitjournal.com Ho Chi Minh Ville a décidé de donner la parole à des élèves qui apprennent le français ! Voici l?article écrit par Felicitas Huong Friedrich, élève à L'Atelier An Phu. Née d'une mère Vietnamienne et d'un père Allemand, Felicitas a grandi en Allemagne avant de choisir de s'expatrier au Vietnam pour découvrir son second pays. 

De quelle nationalité vous sentez-vous la plus proche? Vietnamienne ou Allemande? Depuis que je me suis posé cette question, elle me poursuit.

Quand j´étais petite, je donnais à chaque fois une réponse différente comme si je n´avais pas du tout compris le sens de cette question...

Le Vietnam était présent en moi et partout dans ma vie. En effet, j´ai grandi en Allemagne, mais ma mère étant vietnamienne, il était inévitable pour moi d?être influencée par ce pays et sa culture. Bien sûr je ressemble physiquement à ma mère mais néanmoins, c´est elle qui incarnait le Vietnam à mes yeux. Tout la différenciait des Allemands. Son apparence physique, sa langue, l´odeur de sa cuisine, ses goûts et la musique qu?elle écoutait - je ne comprenais d'ailleurs pas les mots étranges qu'elle prononçait mais elle me touchait profondément. Tout cela était bizarre mais faisait partie de ma vie quotidienne. Mon frère et moi, nous n?avions pas d?amis Vietnamiens puisque l?on habitait dans une petite ville allemande. Jusqu´à mes 20 ans, je n´avais presque jamais rencontré de Vietnamien de mon âge. La plupart des Allemands d´origine vietnamienne ne partagaient pas souvent leur temps libre avec les autres Vietnamiens, même si leurs deux parents étaient Vietnamiens et n'étaient pas trés intégrés dans la société allemande.

Chez moi la situation était un peu différente. Mon père n?était pas que Allemand, il parlait aussi couramment le vietnamien. Il avait étudié cette langue à Berlin puis à Hanoi où mes parents se sont rencontrés et où ils se sont mariés. Donc le pays était présent à la maison grâce à ma mère mais aussi à mon père. Mon père est tombé amoureux du Vietnam grâce à Trang, un étudiant Vietnamien qui habitait dans sa famille pendant les années 60. Depuis, il voulait étudier la langue de ce pays. Pourtant, malgré la passion de mon père pour le Vietnam, pays natal de ma mère, jusqu?à aujourd´hui, nous n'y sommes jamais allés ensemble. C´était la raison pour laquelle je pensais que cet endroit n´était pas si intéressant... 

Pendant mon adolescence, je me suis rebellée contre plusieurs choses et surtout contre mes parents qui n´étaient pas assez « normaux » à mes yeux, ou plutôt «pas assez Allemands » à mon goût. Je voulais être différente, ressembler à mes amis, être comme eux « normale et Allemande ». La relation entre ma mère et moi était difficile et je n'arrivais pas à la comprendre. Je détestais sa façon de parler et tout ce qui n´était pas Allemand.

En revanche, ce qui était bizarre et contradictoire, c?était que je disais à tout le monde que je voulais vivre un jour au Vietnam, sans savoir ce que cela voulait vraiment dire. Quand j´ai commencé à penser à moi et à mon identité; je savais que je devais comprendre ma mère et pour la comprendre, il fallait aller dans son pays. Je savais que, si je ne le faisais pas, je ne me trouverai jamais moi-même.

Je suis venue la première fois au Vietnam quand j´avais 21 ans. C´était exotique et intéressant mais trop étrange et j?étais considérée comme une touriste : des Vietnamiennes m'interpelaient dans la rue ! Malgré cette mauvaise expérience; j'ai décidé de revenir au Vietnam. Un an plus tard, je suis revenue, et ce fut différent? J´ai trouvé beaucoup de réponses à mes questions. La première étape sur le sol vietnamien m´a donné le sentiment d´être chez moi. Je voyais ma mère partout à travers les gens qui me parlaient, mangeaient et s´asseyaient comme elle. Et alors j´ai commencé à me sentir plus proche d´elle. Je suis rentrée en Allemagne où j´ai commencé mes études portant sur l´Asie du sud-ouest et j´ai pris des cours de vietnamien. En classe, j´ai rencontré des Allemands Vietnamiens comme moi. C´était comme une révélation.

Même si je ne voulais pas faire la même chose que mon père, mes études m´ont aussi donné l'opportunité de mieux le comprendre.

Pendant mes études, j´ai dû faire un semestre au Vietnam pour un stage. Cette fois, je me suis dit que je ne pourrais pas m?imaginer vivre au Vietnam. Après le stage, je suis allée en Indonésie pour un autre semestre. J´ai aussi vécu en Chine et voyagé en Asie, mais après avoir découvert le continent, le Vietnam était unique à mes yeux.

A la fin de mes études, j´ai donc décidé de repartir un an au Vietnam pour découvrir ce que je voulais. Maintenant, cela fait 3 ans que je vis ici et je ne sais pas quand je rentrerai en Allemagne? même si je ne peux pas imaginer passer le restant de ma vie ici.

En fait, c'est simple, je suis les deux: Allemande et Vietnamienne. Je n´aime pas être mise dans une boite ou mettre les autres dans une case en fonction de leur nationalité ou celle de leurs parents. Je me sens bénie de grandir avec des cultures et des pensées différentes. Cela me donne la chance d´être plus ouverte.

 


Felicitas Huong Friedrich (lepetitjournal.com/Hochiminhville) 30 Novembre 2016

Lepetitjournal Ho Chi Minh Ville
Publié le 29 novembre 2016, mis à jour le 7 janvier 2018