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EXPATRIATION - Les flops du coaching

main dans la main coach main dans la main coach
Écrit par Nicolas Serres-Cousiné
Publié le 2 février 2016, mis à jour le 2 février 2016

 

 

 

J'ai reçu dernièrement un mail de Louis, Chief Marketing Officer à Londres, qui lit souvent mes rubriques dans lepetitjournal.com et qui me demande si le coaching est vraiment fait pour tout le monde. « Cher Nicolas : Je lis régulièrement vos articles avec intérêt et grand plaisir. À chaque fois, vos histoires se finissent bien. Vous est-il déjà arrivé de faire un constat d'échec avec l'un de vos clients, et si oui, pourquoi ? » Ma réponse ne s'est pas fait attendre.

Cher Louis, 

Les gens qui font appel à moi ont une chose en commun. Ils se retrouvent, malgré eux et souvent pour la première fois, incapables d'avancer sur un dilemme important dans leurs vies. Ils sont frustrés et en colère contre eux, parfois angoissés ou en panique totale. Mon rôle est de les accompagner vers leurs objectifs, en les épaulant, en écoutant ce qu'ils disent, et surtout ce qu'ils ne disent pas, et en les guidant, le regard toujours tourné vers la solution qui est en eux. Parfois, il m'arrive de me sentir désarmé, dans l'impossibilité de faire mon métier correctement. Je n'hésite pas à leur faire savoir et, s'il n'y a plus d'autres solutions, à mettre fin à une collaboration sur laquelle autant eux que moi portions beaucoup d'espoir. Personne n'est fautif. Comme pour une relation amicale, amoureuse ou professionnelle, il y a des principes, des valeurs et des règles à suivre si l'on veut en faire une réussite. Le coaching est loin d'être la solution-miracle, celle qui marche à tous les coups. Voici trois exemples classiques d'un coaching impossible, raté ou dans l'impasse.

 Jeanne en a marre. Je le vois sur son visage. Cette quatrième séance va être intense, « je n'ai pas du tout aimé votre mail Nicolas, c'est tout de même moi la cliente ». Je lui avais écrit assez directement qu'il fallait qu'elle descende de sa tour d'ivoire et qu'elle s'ouvre à moi pour que je puisse la découvrir, et ainsi l'aider. Sans la matière qu'elle seule peut me donner, je ne suis rien, je n'existe pas, mon intuition et ma sensibilité sont au point mort. Mes efforts pour être honnête avec elle ne génèrent qu'une réaction hautaine et sur la défensive qui m'agace. Un coach est l'allié, et l'égal, de son client. Je travaille avec elle, pas pour elle. Si Jeanne ne le comprend pas, notre relation va avoir du mal à exister. « Pour me dévoiler, je dois vous faire confiance », me dit-elle. « Pour me faire confiance, vous devez vous dévoiler », suis-je obligé de lui répondre. Qu'elle me laisse faire mon métier, après elle pourra juger. Elle est en lutte contre moi, bornée, glaciale et sans humour, retranchée derrière un schéma employeur-employé qui ne peut finir que d'une façon négative. Nous ne sommes pas en phase, ce cercle vicieux me fatigue et m'ennuie. Pour un coach tel que moi, perdre sa curiosité c'est comme perdre la vue. Je n'ai plus envie d'en savoir plus, de creuser et de la mettre à nu pour mieux saisir là où est le cœur de son problème. La vérité est que l'on ne s'apprécie guère. Nous ne sommes pas compatibles, “no chemistry between us” comme on dit chez moi aux USA. Lorsqu'elle suggère d'arrêter notre collaboration, je saute sur l'occasion. C'est bien la seule fois où nous sommes retrouvés sur la même longueur d'ondes.

 

J'aime beaucoup Pierre, un personnage passionnant et touchant à  la fois. Cela fait deux mois que l'on travaille ensemble sur son  installation à Dubaï qui ne se passe pas aussi bien que ce qu'il  pensait. Après un départ sur les chapeaux de roues, je trouve qu'il  perd pied avec ce que je lui ai enseigné sur le coaching et sur la  façon bien spéciale de communiquer entre nous. Axées sur le  présent, les réponses doivent être concises et précises. Il a  maintenant tendance à s'éparpiller, à revenir dans le passé, à  s'écouter parler, à reporter la faute sur les autres ou à me    demander mon avis comme si j'étais son ami ou un conseiller. Je  dois l'interrompre souvent pour le remettre dans le droit chemin. L'effort que je lui demande de faire est nécessaire pour qu'il continue d'avancer vers son objectif. Il a du mal et son manque de discipline ne fait rien pour arranger les choses. Il est souvent en retard à nos rendez-vous Skype et se souvient rarement de ce dont nous avons parlé la semaine précédente, alors que le coaching est un travail continu, une marche après l'autre. Bref, Pierre se laisse porter par les événements, et accessoirement par son coach, au lieu de se prendre en main en s'appuyant sur moi. Pour pouvoir tirer tous les bénéfices d'un bon coaching, il faut s'engager à fond dans le processus, c'est un vrai travail, porté vers l'avant, vers l'action. Il faut savoir, et oser, se faire violence. Je n'ai pas réussi à recadrer notre relation qui, hélas, devenait de plus en plus stérile. Pierre fut très déçu de ma décision de ne pas poursuivre la route avec lui, mais m'a téléphoné dernièrement, pour me remercier. « Avant d'être prêt pour un coaching de A à Z et savoir comment me sortir du dilemme dans lequel je patauge depuis longtemps, j'ai compris grâce à toi que j'avais besoin de faire un gros déblayage personnel avec un thérapeute pour savoir pourquoi je patauge sans fin dans ce dilemme-là ». 

 

Steven a tout du client idéal. Non seulement, je me sens capable de l'aider à prendre le tournant qu'il désire faire dans sa vie professionnelle, mais c'est aussi un jeune homme de trente ans qui m'épate par ses valeurs morales et son envie de se dépatouiller d'un dilemme pas facile à gérer. Après cinq mois d'un beau travail en commun, nous voila au pied du mur. Il s'est redécouvert en prenant tous les risques, en osant tout me dire et même encore un peu plus. Il n'y a rien d'autres à discuter, on tourne en rond, la prochaine étape est l'action. Il faut plonger, mais il est paralysé tout en haut du plongeoir. Lui seul peut prendre la décision qui l'épanouira et dont il a toujours rêvé, démissionner de son job de banquier à São Paulo et reprendre l'entreprise familiale de lunettes de ski en Savoie. Un 360 de choix ! Plus il attend, plus la peur augmente, plus je suis inefficace. Je ne peux que le challenger sur son vrai désir de changer. Il convient qu'à son jeune âge, il peut se permettre de tenter un pari difficile, de le rater et, au pire, de reprendre le même job qu'avant. Il n'a donc aucune raison valable pour ne pas faire le grand saut. Je sens qu'il aimerait que je le pousse dans le vide, mais ce n'est pas mon métier. Au contraire, je décide de le laisser seul face aux fausses excuses dont il se gargarise encore et encore. Quand il sera prêt, je l'aiderais alors à prendre l'action qui changera sa vie et, comme pour la grande majorité des gens qui viennent me voir, il découvrira ainsi à quel point le “saut” est beau.

Être compatible, être engagé pleinement dans le processus et avoir vraiment envie de changer sont les éléments incontournables pour un coaching réussi. Ne perdez pas votre temps, et votre argent, dans la mauvaise démarche ou avec le mauvais coach. Laissez parler votre intuition, au final, c'est bien vous l'expert de votre vie.

 Nicolas Serres Cousiné, le life coach des expats français à travers le monde  (www.lepetitjournal.com) - mardi 2 février 2016

 En savoir plus: Le site de Nicolas Serres Cousiné

Avertissement: Les chroniques de Nicolas Serres-Cousiné sur lepetitjournal.com s'inspirent de sa pratique professionnelle. Chaque chronique est un mélange romancé de plusieurs témoignages sur le même thème. Ils ont été modifiés de manière à préserver l'anonymat de leurs auteurs.

 

Nicolas Serres-Cousiné
Publié le 2 février 2016, mis à jour le 2 février 2016