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LA HORSE FAIR DE SMITHFIELD - Une tradition à conserver ?

Écrit par Lepetitjournal Dublin
Publié le 1 mars 2015, mis à jour le 12 août 2016

Dimanche matin, 9h30, on entend des hennissements alors qu'on approche du quartier de Smithfield. En débouchant sur la grande place, curieux, on tombe nez à nez avec trois petits poneys, la crinière frisant sous la bruine. Un enfant d'à peine 10ans les promène très professionnellement parmi des acheteurs potentiels. Nous sommes à la Smithfield Horse Fair, c'est-à-dire au marché de chevaux, qui se tient sur cette immense place deux fois par ans. Les guides touristiques présentent cette foire comme le marché le plus typique, le plus original, à ne pas rater? Et pourtant, bien loin de ce romantisme, la Horse Fair est surtout une foire très controversée.

Smithfield Horse Market Mars 2015
Les touristes qui avaient bravé la pluie, emballés par la description de la foire dans leur guide de voyage ont dû être déçus hier matin. La faute au mauvais temps ou à la réputation de plus en plus sinistre de la foire ? Nous ne le saurons pas, mais il n'y avait en tout cas pas foule. 10 chevaux maximum, autant d'enfants ou adolescents pour les tenir, et quelques adultes au milieu. Et tout autour, des policiers. Pour tuer le temps, un père et son fils s'entraînent à manier une charrette à deux roues tirée par un cheval. On est loin de la photo de Wikipédia montrant une place bondée, avec autant de chevaux que d'humains, en 2008. Alors que s'est-il passé ?

Depuis le Moyen-Âge, les foires à chevaux avaient la réputation d'être le théâtre de violences ou dérives en Irlande. La Smithfield Horse Fair se dressait fièrement tous les premiers dimanches du mois, dernière foire à chevaux de Dublin. Mais le voisinage n'était pas sensible à cette tradition, se plaignant du bruit et de l'odeur. A cela s'ajoutait les reproches de la DSPCA, la Société
dublinoise pour la prévention de la cruauté envers les animaux. En effet, le marché irlandais ne manque pas de chevaux, qui remplissent les centres pour animaux abandonnés. La DSPCA estime alors que les chevaux de la Horse Fair sont rudoyés par leurs propriétaires qui les vendent à un prix indignement bas. La foire était également dans le collimateur de la Garda, dû aux explosions fréquentes de violences. La communauté des gens du voyages, qui compose la plus grande partie des vendeurs de chevaux s'attiraient donc les foudres du quartier, de la DSPCA et de la Garda, mécontents de ce qu'il se passait lors de la foire.

Or en 2011, une fusillade a éclaté après une altercation entre deux familles de la communauté des gens du voyage. Trois personnes ont été blessées. Un engin explosif a été saisi par la Garda et deux personnes ont été arrêtées. Cette fusillade et les images qui ont été publiées, montrant une énorme flaque de sang sur la place, ont énormément choqué les Dublinois, achevant d'en convaincre un bon nombre que cette foire devait être fermée. En janvier 2013, le Dublin City Council a donc voté une loi réduisant à deux fois par an le nombre de Horse Fair (le premier dimanche de septembre et mars), et instaurant de nouvelles règles pour protéger les chevaux et les spectateurs.

Le contexte historique et social de la Smithfield Horse Fair éclaire la scène que nous voyons sur la grande place hier matin : peu de spectateurs, et des policiers tendus, plus nombreux que les participants à la foire. La pluie, puis la grêle et enfin la neige, ne nous permettront finalement pas de savoir s'il reste beaucoup de supporters de cette Smithfield Horse Fair.

Audrey Lalli (www.lepetitjournal.com/dublin), lundi 2 mars 2015

Crédit photo: Creative Commons - Andrea & Stefan

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Publié le 1 mars 2015, mis à jour le 12 août 2016

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