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J-B Fournier : “J’imaginais la Thaïlande comme un pays rigide”

Jean-Baptiste Fournier ThailandeJean-Baptiste Fournier Thailande
Jean-Baptiste Fournier
Écrit par Catherine Vanesse
Publié le 4 janvier 2021, mis à jour le 2 juillet 2021

Résident en Asie du Sud-est depuis plus de 30 ans, Jean-Baptiste Fournier a été pendant de nombreuses années traducteur thaïlandais français agrémenté par l’ambassade. Aujourd’hui, il vit dans la petite bourgade de Paï. 

Né en 1959, Jean-Baptiste Fournier découvre la Thaïlande à l’âge de 20 ans et c’est un coup de foudre pour ainsi dire immédiat. Pour assouvir cette passion, le jeune homme de l’époque se lance dans des études de thaïlandais à la faculté des langues orientales de Paris. Là, il acquiert une maîtrise de la langue et de la culture de l’Asie du Sud-est qui le mènera à être tour à tour consultant pour des compagnies françaises souhaitant s’installer au Laos au début des années 1990, traducteur officiel pour plusieurs ambassades francophones en Thaïlande, directeur du cabinet Axiom, et enfin organisateur de voyages à moto. De Vientiane en passant par Pattaya, Buriram et Phaya, le sexagénaire vit désormais à Paï où Lepetitjournal.com l’a rencontré pour revenir sur son parcours professionnel, mais aussi pour aborder certaines difficultés qu’il a rencontrées et pour envisager l’avenir du tourisme.

Qu’est-ce qui vous a amené en Thaïlande?

Je suis venu en Thaïlande un peu par accident! C’est marrant parce quand j’étais gamin, je trouvais le nom ‘Thaïlande’ un peu choquant en comparaison au côté chantant des noms des pays voisins. Je me suis toujours demandé, mais qu’est-ce qui se cache derrière ce mot, on parle des Thaïlandais, des massages, etc. En fait, je voyais le pays comme étant assez carré, rigide, ce qui est loin d’être le cas.

Lors de mes études de droit en France, j’avais un ami de père anglais et de mère française né en Thaïlande. Avec d’autres étudiants, nous avons décidé de partir en voyage en Thaïlande et cet ami a été en quelque sorte notre guide. J’avais 20 ans à l’époque, c’était mon premier séjour en Asie et cela a été un déclic. 

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Après mes deux années de droit, j’ai fait mon service militaire et ensuite j’ai décidé d’apprendre le thaïlandais et je me suis inscrit à la faculté des langues orientales à Paris. Après mes études, en 1987, je suis venu en Thaïlande pendant un an pour travailler dans un camp de réfugiés à Chonburi avant de définitivement tout lâcher en France et de venir ici, j’avais 28 ans. 

Vous êtes ici depuis un peu plus de 30 ans, quelles sont les différentes activités que vous avez exercées?

Autant sur le niveau professionnel que personnel, j’ai eu trois périodes de 10 ans. J’ai vécu au Laos entre 1990 et 2000 en tant que consultant dans l’exportation pour des compagnies étrangères, en Thaïlande à partir de l’année 2000 avec une première tranche jusqu’en 2011 en tant que directeur d’Axiom Smart Services et à partir de 2011, je me suis tourné vers le tourisme en organisant des tours à moto et aujourd’hui, j’ai une maison d’hôtes à Paï. 

Vous avez également été traducteur officiel pour l’ambassade de France? 

En effet, j’ai même commencé par des traductions et des cours de thaïlandais avant de travailler pour Axiom. Après avoir quitté le Laos, un ami m’avait dit que le consul honoraire à Pattaya souhaitait ouvrir une cellule francophone, que je pourrais faire de la traduction pour les différentes ambassades francophones en Thaïlande. 

Donc, j’ai commencé à faire des traductions et au fur et à mesure, j’ai eu de plus en plus de demandes de gens qui avaient besoin d’aide pour obtenir un visa pour leur compagne pour aller en France, j’ai fait de l’accompagnement sur les dossiers de mariage, etc. Ensuite, j’ai embauché des comptables et un avocat pour pouvoir proposer, à travers Axiom, des services de comptabilités, des conseils juridiques pour constituer une société ou pour les contrats en tous genres. J’ai fait cela jusqu’en 2011 puis je suis parti à Bang Saray, au sud de Pattaya, où j’ai acheté des motos, et j’ai commencé à organiser des tours. 

Est-ce que cette transition professionnelle est liée à l’affaire de faux-visa qui a valu un mois de prison à un Français en 2009 ?

J’en avais un peu marre et avec le temps, la société n’a cessé de s’agrandir, à un moment donné, nous avions près de 15 employés et je dois reconnaître que je ne suis pas un très bon gestionnaire. Après, quand tu as une casserole aux fesses, cela te poursuit, en particulier sur Internet et sur les forums. 

C’est une histoire étrange. Le gars ne voulait pas sortir du pays pour changer son visa de retraité en visa business, il m’avait donc demandé de trouver une solution malgré mes objections. Et puis un jour, mon employé me dit que le flic à l’immigration peut changer son visa sans sortir du pays. Dans cette histoire, je n’ai fait que l’intermédiaire. Au bout de 90 jours, il devait aller à l’immigration pour prolonger son visa et là, coup de théâtre, on lui dit que c’est un faux visa! Ils l’ont arrêté tout de suite et il a passé une trentaine de jours en prison. 

Mon employé et moi-même, nous avons été convoqués à l’immigration pour nous interroger, ça devait aller au tribunal, mais ce n’est jamais allé jusque là. On a essayé de me faire porter le chapeau, certains ont raconté que j’avais fait le visa dans mon arrière-boutique avec de faux tampons, etc. J’ai tout fait pour qu’il ne fasse pas ce visa, j’aurais pu lui dire de se démerder, mais c’était mon client. 

Axiom se retourne contre un sous-traitant dans l'affaire du faux visa

Quand êtes-vous arrivé dans le nord de la Thaïlande ?

Après Bangsaray, je suis parti à Buriram, Phayao et je suis venu voir ce qu’il se passait à Chiang Mai il y a 3 ou 4 ans. Je n’avais jamais pensé atterrir à Chiang Mai et en fait la ville m’a beaucoup plus. Je me suis même dit à ce moment-là qu’après mon séjour au Laos, j’aurais dû directement venir à Chiang Mai au lieu d’aller à Pattaya. Mais bon, on ne refait pas une vie! Quand j’habitais à Chiang Mai, j’ai commencé aussi à louer une maison à Paï pour les vacances et puis j’ai fait le saut de m’y installer complètement il y a un an et demi. 

À Paï, j’ai ouvert une maison d’hôtes il y a un an. J’accueille principalement des Thaïlandais, les gens viennent en famille ou entre amis, cela les rassure de ne pas être avec d’autres clients. En ouvrant cette maison d’hôtes, mon idée est que les gens ne viennent pas seulement pour dormir, mais pour profiter d’une expérience, je peux leur faire à manger, les emmener découvrir la région. 

Avant le Covid-19, j’étais également en discussion avec une agence de voyages pour mettre en place des circuits à motos dans la région, ce projet est pour le moment à l’arrêt. 

Pensez-vous que la manière de voyager va changer ? 

Je pense que même si le tourisme repart, cela ne va pas revenir comme avant, le tourisme libre, c’est fini. Avant, tu étais à Paris et tu te disais que le lendemain tu voudrais être à Bangkok, tu prenais juste un billet d’avion, il n’y avait pas besoin de visa, tu pouvais ensuite aller au Laos, au Cambodge, etc. Peut-être que ce sera toujours possible, mais cela aura un coût. Les voyageurs en mode sac sur le dos, s’ils n’ont pas un peu d’argent, on ne va plus les voir. Pour des villes comme Paï qui vivent principalement grâce à cette clientèle, cela ne va pas être évident. Cette année, Paï est terriblement calme et il est certain que l’année 2021 va être pire, il va encore y avoir des pertes, les locaux sont très pessimistes. 

Ensuite, il y aura moins de tourisme de masse, moins de monde, il faut dès lors se tourner vers des activités et des services de meilleure qualité et plus personnalisés, des infrastructures plus petites, des hôtels avec moins de chambres, mais plus agréables où les gens pourront se sentir en sécurité, car il va y avoir pendant un certain temps une crainte de voyager. 
 

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