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RENCONTRE - Once upon a time, les vies de Kosal Khiev

Écrit par Lepetitjournal Cambodge
Publié le 27 janvier 2015, mis à jour le 27 janvier 2015

A l'occasion de la sortie du documentaire « Cambodia Son » sur Kosal Khiev, ce jeudi 29 janvier, nous publions le portrait que Le Petit Journal lui avait consacré l'année dernière. Un film à ne pas rater, un artiste à voir absolument sur scène.

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La  destinée de Kosal Khiev est hors du commun. Survivant du système carcéral américain après 16 ans de prison, la poésie le sauve. Déporté au Cambodge en 2011, il est aujourd'hui un slameur reconnu, un homme respecté et sollicité. Rencontre avec l'artiste et l'homme qui ne font qu'un.

C'est l'histoire d'un fils unique dans une ancienne vie, et aujourd'hui l'ainé de quatre demi frères et soeurs côté père, un père longtemps inconnu ou prêté pour mort, et le benjamin  de dix autres côté mère.
Vies éclatées. Fils unique, ainé et benjamin. Kosal Khiev est tout à la fois.
Once upon a time, les vies de Kosal Khiev. Un jour viendra où l'on lira le livre de ses vies, où l'on verra le film de ses vies.

Kosal est poète, « tatoo artist », survivant du système carcéral américain. Kosal Khiev est un américano-khmer.  Né dans les camps en Thaïlande de parents fuyant le régime des khmers rouges, il migre aux Etats-Unis avec une partie de sa famille, sans son père qui ne reçoit pas l'autorisation. Multiples déchirures à tout juste trois ans.

 

Adolescent, il plonge dans un gang, à 16 ans tombe  pour tentative de meurtre lors d'un règlement de compte avec un gang rival.
Quatorze ans de prison pour un adolescent et en sortir à 31 ans. Sortir vivant et avec le goût de vivre est déjà un miracle. « J'ai regardé la mort plusieurs fois en face, je n'en ai plus peur » dit-il sans bravoure, aucune. En 2011, Kosal est libéré pour être aussitôt expulsé vers le Cambodge, pays d'origine qu'il ne connaît pas.

Au Cambodge, il débarque seul, poète et artiste visuel qu'il est devenu en prison. Aujourd'hui, en février 2014, la vie de Kosal est surréaliste. Le temps de l'interview, quatre ou cinq personnes le saluent. Les tables environnantes sont happées par la conversation. Echanges de contacts, envie de travailler avec lui, de parler avec lui, de le retrouver ? l'homme  magnétise, déborde d'empathie. Son phrasé danse, ses yeux rythment les mots, ou le contraire, son corps vibre, les bras tatoués balancent. Quand il prononce le mot passion, ses lèvres claquent. Le mot surgit de ses tripes.

Il y a aussi cette tension qui transparait, donnant l'impression d'un décollage imminent. Vers où ? Quelque part entre quatre murs, le cauchemar de la nuit dernière et le sourire de ce jeune khmer qui a mis au placard son idole Tupac pour le remplacer par Kosal. Quelque part entre l'écran du documentaire « Cambodian Son » qui lui est consacré, le Japon où il est invité,  et sans aucun doutes sous le toit où, en mars prochain, ses parents et lui se retrouveront pour la première de toutes leurs vies confondues. Presque jour pour jour trois ans après sa déportation au Cambodge.

 

Ils sont 300 déportés comme lui forcés à vivre dans un nouveau pays, celui de leurs origines. « La diaspora doit revenir au Cambodge et être  un exemple pour les jeunes. Ils doivent changer leur perception devenue génétique de la réussite. Un khmer à la peau noire peut être un bon médecin, un bon avocat ou policier ? ». Il poursuit : « je dis aux jeunes de ne pas attendre quelque chose de l'extérieur. Le seul Cambodge qu'ils connaissent est un pays dépendant des ONG.  J'essaie de provoquer un changement de perception, le bonheur est un choix, la liberté aussi ». Kosal signifie « ton karma » en khmer.
« Je pousse les limites. Les artistes khmers sont sous évalués par rapport aux artistes étrangers. Mais ils se sous-évaluent aussi eux-mêmes. Une part du problème est là ».

Comment pousser ses limites et se sauver par la poésie dans une cellule d'isolement pendant un an et demi ? « Je me suis demandé si cet isolement avait une valeur, un sens alors que personne ne savait que j'étais là.  C'est là que j'ai commencé à écrire. J'écrivais dans ma tête une phrase que je mémorisais et j'en écrivais une autre. Je les récitais à travers la petite ouverture de  la porte de ma cellule. Les autres prisonniers me demandaient de recommencer ». Sa première scène avec comme spectateurs « des tueurs, des voleurs, et le gardien aussi qui m'a glissé une feuille et un stylo ». 

La scène internationale le remarque. La scène où tout explose, sa rédemption, sa joie, ses mots, sa sagesse et ses blessures. Une présence animale et instinctive à découvert et à découvrir. L'homme aussi.

Emmanuel SCHEFFER - www.lMercredi 12 février 2014.

 

Vidéo de "why I write : Verses in Exile #1", réalisée par Studio Revolt

 

Trailer du film "Camboddian Son "

Le site de Kosal Khiev

 

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Publié le 27 janvier 2015, mis à jour le 27 janvier 2015

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