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FILS DE PAMPA - Soja : le bon grain et l’ivraie

Écrit par Lepetitjournal Buenos Aires
Publié le 2 juin 2010, mis à jour le 13 novembre 2012

 Vous ne comprenez rien au campo ? Les OGM, le conflit des agriculteurs, la riche Pampa et? tout ce qu'il y a dans votre assiette, vous sont racontés sans façon dans ce feuilleton écrit pour lepetitjournal.com par un journaliste franco-argentin expert en la matière, Marc-Henry André. Aujourd'hui, quatrième épisode. Soja : le bon grain et l'ivraie

(Photo : DR)

Après avoir découvert la filière du b?uf, le moment est venu d'enquêter sur le semis direct avec round-up. Pour moi, cela reste du chinois.
Au téléphone depuis Paris, Jean-Luc m'explique : "Les agriculteurs français veulent simplifier leurs techniques de culture, pour moins utiliser leurs machines, moins polluer et économiser du carburant. Ils ont d'ailleurs intérêt à laisser en place les résidus des cultures récoltées : ces tiges, feuilles et racines forment un tapis qui maintient la structure des sols, limite leur érosion et conserve leur matière organique. Dans ce domaine-là, les Argentins sont des pionniers. Ils ne labourent même plus. Ils sèment directement une culture par-dessus l'autre, le jour de la récolte. Les Français s'y mettent. Mais en France, on n'a pas accès aux variétés qui permettent de travailler en semis direct". Ces semences OGM, qui résistent aux herbicides, ne sont en effet pas encore disponibles sur le marché européen. Jusqu'à présent, les militants anti-OGM ont imposé leurs vues.

Le semis direct consiste à mettre les semences directement en terre, sans retourner celle-ci au préalable. Mais je ne vois toujours pas le rapport entre cette technique et les OGM.
En France, les journalistes parlent souvent des OGM. Certains les désignent comme "les plantes Frankenstein". Cela fait peur? et ça fait de l'audimat ! A les entendre, ces plantes qui sortent des laboratoires d'une entreprise liée à l'armée américaine (ils n'oublient jamais de le dire) pourraient provoquer une catastrophe sanitaire planétaire. Consommer des OGM pourrait modifier notre organisme ou entraîner des malformations chez nos enfants ou petits-enfants. Merci, Monsanto !

Dans les campagnes françaises, les agriculteurs se soucient peu de tels risques hypothétiques. Depuis des années, ils donnent à leurs vaches, porcs et volailles du soja et du maïs transgéniques importés des Etats-Unis, du Brésil ou d'Argentine et n'ont jamais constaté la moindre maladie.
Mais certains s'inquiètent. Si une culture devient beaucoup plus rentable que les autres (comme le soja OGM, aux coûts de production relativement bas), tous les agriculteurs risquent de l'adopter et de cultiver les mêmes variétés de la même espèce de plante possédant le même gène propriété d'une seule et même entreprise : Monsanto.

Selon les agriculteurs anti-OGM, la mise sur le marché de ces semences conduirait la France, à terme, à ne plus produire les céréales, fruits et légumes typiques de chaque région, ni le lait et la viande provenant des quelques races de bovins préservées. De fait, en Argentine, depuis la mise sur le marché, en 1996, des semences de soja OGM résistants à l'herbicide glyphosate, cette culture croît de façon exponentielle et couvre aujourd'hui, en 2010, les deux tiers des surfaces cultivées dans le pays, soit 19 millions d'hectares ! Les craintes des Français ne sont pas infondées, au moins sur ce point.
En effet, pourquoi fabriquer du fromage si on peut gagner le double en cultivant sans effort des plantes transgéniques? A priori est en jeu la diversité de notre production alimentaire et tout ce qui en découle : la gastronomie, le paysage, la culture, le tourisme et jusqu'au plaisir des sens.

Cependant, même en France où le sujet fait débat et leur culture est interdite, nous consommons tous depuis des années les OGM présents dans nos aliments, nos médicaments et nos produits cosmétiques. Certains agriculteurs s'alarment, mais d'autres veulent cultiver ces nouvelles variétés, comme le font d'ailleurs leurs collègues canadiens, américains, mexicains, chinois, brésiliens et argentins. Eux voient les anti-OGM comme des idéologues sourds aux avis des scientifiques et râlent de ne pas avoir accès à cette technologie qui s'impose partout ailleurs dans le monde.
La suite de mon enquête expliquera mieux cet apparent paradoxe...

Marc-Henry ANDRE (www.lepetitjournal.com - Buenos Aires) mercredi 2 juin 2010

Installé à Buenos Aires depuis 2005 comme journaliste indépendant et correspondant de La France agricole, Marc-Henry André est l'auteur de La Pampa que los parió (2009). Lire son interview "le point sur le campo" dans lepetitjournal.com.

Episodes précédents
Prendre le taureau par les cornes (épisode 1)
La charrue avant les boeufs (épisode 2)
Oh la vache! (épisode 3)

lepetitjournal.com Buenos Aires
Publié le 2 juin 2010, mis à jour le 13 novembre 2012

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