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ECONOMIE – Argentine, un pays d’entrepreneurs

Écrit par Lepetitjournal Buenos Aires
Publié le 27 janvier 2012, mis à jour le 14 novembre 2012

Pour clôturer notre rétrospective "Best off 2011", nous vous invitons au débat lancé sur l'entreprenariat en Argentine. Directrice du Centre pour l'entreprenariat à l'IAE Business School, une référence en Argentine, Silvia Torres Carbonell dirige également le Global Entrepreneurship Monitor (GEM), un projet mondial de recherche qui étudie les liens entre volonté d'entreprendre et développement économique. Elle explique ici pourquoi l'Argentine est un pays d'entrepreneurs, et en quoi cela constitue une réalité ambiguë

(Photo: DR)

L'Argentine est-elle un pays d'entrepreneurs?
Depuis les débuts du GEM en 2000, l'Argentine a toujours fait partie du groupe des quinze pays les plus entrepreneurs, mais avec d'importantes fluctuations quant à la relation entre le pourcentage d'entrepreneurs par nécessité et celui par opportunité. En temps de crise, la première catégorie augmente.

La différence entre le pourcentage d'entrepreneurs par opportunité et ceux par nécessité, détermine la maturité économique d'un pays?
C'est exact. Dans les pays émergents, les entrepreneurs par nécessité sont en majorité, parce qu'ils n'ont pas d'option d'emploi ou parce qu'ils ont besoin d'augmenter leurs revenus. En revanche, lorsque le revenu par habitant a augmenté, comme c'est le cas dans les pays plus développés, la quantité de projets baisse mais leur qualité augmente. En Argentine, cette année, 63% des projets au stade précoce sont motivés par l'opportunité, ce qui représente une forte croissance -de 50 %- par rapport à 2009, ceux qui sont motivés par la nécessité ayant diminué de 43% en 2009 à 36% en 2010.

Comment est composé l'ADN de l'entrepreneur argentin?
De par sa culture et son histoire, sans compter la conjoncture, l'Argentin est un entrepreneur. Nos grands-parents étaient des immigrants, c'est-à-dire des entrepreneurs nés. De nouveau, la crise actuelle a généré une culture dans laquelle il faut créer ses propres ressources pour survivre. L'Argentin est une personne très créative, la peur de l'échec ne le tétanise pas -au contraire il croit qu'il peut tout faire- et il a un niveau relativement élevé d'éducation, ce qui est un avantage certain.

Est-ce facile de monter une entreprise dans notre pays?
Non. L'accès ?difficile- aux capitaux, l'environnement et le contexte d'affaires, combinés avec l'absence de prévisibilité, voici les principaux obstacles que rencontrent les entrepreneurs locaux. L'Argentine est classée 118e dans le classement Doing Business 2010 de la Banque mondiale. Ce rapport international classe les pays selon le contexte de création d'entreprises qu'ils offrent: procédures, coûts etc. A cet égard, notre pays a perdu des positions par rapport à 2009.

Dans ce contexte, quid des femmes?
En général, plusieurs caractéristiques associées au genre féminin rendent plus facile l'acte d'entreprendre: la capacité à gérer plusieurs choses à la fois, celle d'apprendre à générer ses propres ressources, et la préoccupation pour le processus en lui-même et non pas tant pour la finalité. Une autre question-clé est la nécessité de concilier travail et vie personnelle: avoir une entreprise offre une certaine liberté, même si en réalité c'est un peu illusoire. De fait, les hommes veulent de plus en plus devenir entrepreneurs pour la même raison ?et les jeunes aussi, car ils établissent une relation au travail différente de celle de leurs parents- ils donnent la priorité à leurs goûts et à développement personnels plutôt qu'à l'obtention d'un gros salaire.

Et la femme argentine?
Elle est relativement "entrepreneuse": elle se situe entre les femmes du Guatemala, qui s'engagent plus que les hommes, et celles du Moyen-Orient, avec des pourcentages très bas. Dans notre pays, les hommes s'engagent plus par opportunité que les femmes. Mais quand le taux d'entrepreneurs par nécessité augmente dans notre pays, ce sont les femmes qui prennent la tête du mouvement: en période de crise, ce sont les premières à chercher des revenus supplémentaires pour leur foyer. Les femmes s'engagent dans des secteurs traditionnellement féminins comme la mode et le design (Cheeky, Mimo, Como quieres que te quiera, La Pâtisserie?), le tourisme, le vin, la gastronomie (Maru Botana, Narda Lepes) et les cosmétiques (Veronica Zuberbulher). Les entrepreneuses sociales sont aussi à prendre en compte, c'est un secteur dans lequel les Argentines sont très bien formées.

Propos recueillis par Laurence THOUIN pour Perspectives (www.lepetitjournal.com - Buenos Aires) ? mercredi 15 juin 2011

lepetitjournal.com Buenos Aires
Publié le 27 janvier 2012, mis à jour le 14 novembre 2012

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