Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 1

Tourisme : quelles perspectives pour la Roumanie?

gheorghe fodoreanu tourisme perspectives roumaniegheorghe fodoreanu tourisme perspectives roumanie
Écrit par Grégory Rateau
Publié le 29 juillet 2019, mis à jour le 29 juillet 2019

Notre rédaction est allée à la rencontre de Gheorghe Fodoreanu, président de l'agence de voyage Invitation Romania Travel et vice-président de la Fédération des Patrons du Tourisme Roumain (FPTR), considéré comme un des pionniers du secteur du tourisme en Roumanie. Nous lui avons posé des questions sur les perspectives de développement de ce secteur d'activité, et tenté de cerner avec lui le profil des étrangers qui se rendent de plus en plus nombreux chaque année pour découvrir ce pays encore méconnu qu'est la Roumanie.

 

 

Grégory Rateau : Pouvez-vous nous présenter brièvement votre agence de voyage ?

Gheorghe Fodoreanu : Nous sommes une agence de voyage qui travaillons avec la France depuis très longtemps. On reçoit l'équipe de France de rugby depuis les années 60. On a, après la Révolution, mis en place un département de voyage d'affaire pour nos clients, un département pour les voyages sportifs, et bien sûr, un département export de service qui a extrêmement bien marché l'année passée avec 3 millions d'euros de recettes à l'export. On couvre 60% de la part du marché français, on est partenaire de Thomas Cook, Nouvelles Frontières... A côté de la France on est présent sur d'autres marchés européens et mondiaux. On envoie également beaucoup de clients roumains en France chaque année, des touristes mais également des structures qui organisent des événements en français. On est devenu nécessaire des deux côtés.


 

La Roumanie séduit-elle les touristes étrangers ?

Les Français ont de nombreux a priori sur le pays, je ne vais pas vous mentir, mais je vois par expérience que lorsqu'ils reviennent chez eux après un séjour ici, ils sont positivement surpris et recommandent cette destination à leurs amis. La différence entre l'image de la Roumanie à l'extérieur et la réalité, est tellement grande que tous nos clients sont satisfaits et redemandent souvent à approfondir leur découverte du territoire. Ils me disent : « mais on ne connaît rien sur ce beau pays, qu'est-ce que vous faites ? Vous ne savez pas faire votre promotion. »


 

Justement, quels sont les atouts réels de ce pays ?

Il ne faut pas oublier que ce pays est le 7ème de l'Europe en terme de superficie, donc il ne manque pas de paysages et d'activités. On a le Delta du Danube et sa bio-diversité, le Maramures avec ses couleurs et ses traditions extraordinaires, on a les églises fortifiées, les monastères, les montagnes des Carpates, ses mystères, ses légendes, ses ours et ses loups, de beaux trajets de randonnées, les côtes de la Mer Noire, les villages aux influences saxonnes et bien d'autres choses. Le Prince Charles est tombé amoureux du pays, de ses villages hors du temps et il est devenu l'un des meilleurs ambassadeurs de la Roumanie dans le monde. Il n'y a pas que Bucarest pour faire rayonner la culture, il y a des villes comme Cluj, Timisoara, Brasov et Sibiu pour ne citer que les plus importantes, où l'on trouve une architecture à couper le souffle, des festivals, des événements qui donnent vie à la cité et attirent de plus en plus de touristes désireux de voir une autre facette encore peu explorée de l'Europe de l'Est. Constanta a été pendant longtemps un port incontournable reliant l'Orient et l'Occident, avec encore aujourd'hui, des influences turques et arméniennes visibles un peu partout. La Roumanie a une histoire et des traditions, qui gagnent vraiment à être connues et reconnues. Actuellement, il y a de nombreux projets touristiques qui se développent autour du Danube, qui est la plus grande route maritime de toute l'Europe.
 

 

Que pouvez-vous nous dire sur la qualité de service ? Est-elle à la hauteur de l'exigence des touristes ?

Les services se sont améliorés depuis l'entrée de la Roumanie dans l'Union Européenne mais ils peuvent encore être améliorés. Cela dépend de l'offre, de la ressource humaine. On a quand même 4 millions de Roumains qui travaillent à l'extérieur du pays, et sur ces 4 millions, de nombreux Roumains ont travaillé dans l'industrie touristique. Il est sans doute vrai que les meilleurs sont chez nos voisins européens, et il faut donc chaque année faire et refaire de nouvelles générations qui se spécialiseront dans ce secteur difficile. Il faut de l'expérience et de la théorie, cela demande de vraies formations poussées et des revenus qui sont à la hauteur des attentes des Roumains pour qu'ils décident de choisir leur pays pour se lancer dans le tourisme, la restauration, l'hôtellerie. Il faut donner envie à ceux qui sont partis de revenir, riches de leur expérience à l'étranger. Je suis en contact avec des Roumains un peu partout dans le monde et leur pays leur manque, ils voudraient revenir mais attendent que les choses bougent avant de prendre le risque de rapatrier leur famille et de tenter quelque chose ici. Ils ont été déçus et je peux les comprendre. On ne peut s'improviser dans ce secteur d'activité, il te faut plusieurs années, l'usage du monde, pour répondre aux attentes des touristes et leur offrir la qualité de service qu'ils sont en droit d'attendre. En Roumanie nous avons un sens de l'accueil qui séduit les touristes en quête d'authenticité mais nous devons répondre aux attentes des différents profils d'étrangers qui décident de franchir le pas et de venir découvrir le pays.

 

 

Justement, y-a-t-il un type, un profil de touriste, qui choisit de venir ici ?

Oui, par exemple, ceux qui choisissent les circuits culturels, les amoureux des randonnées découverte/aventure, les touristes désirant faire des croisières sur le Danube. Le problème reste les vols directs, car beaucoup de villes attractives ne sont pas reliées directement au reste de l'Europe. Le projet d'autoroute va tout changer selon moi, elle reliera Budapest-Bucarest-Constanta. Le nombre de touristes augmente chaque année, 12-14%, l'année dernière a été la plus exceptionnelle. Je ne vivrais sûrement pas pour le voir, mais je projette une Roumanie avec 20 millions de touristes, c'est-à-dire un touriste par habitant comme dans d'autres pays d'Europe. Là je considérerai que le tourisme en Roumanie a accompli son devoir.
 

 

Les étrangers qui vivent en Roumanie aiment cette authenticité dont vous parliez tout à l'heure. N'avez-vous pas peur qu'elle soit sacrifiée si les touristes affluent en masse ?

Voilà le plus important. Si on a l'autoroute, on perdra inévitablement cette authenticité qui m'est également très chère. Il faut donc trouver le juste équilibre. Je suis persuadé que ce sont les gens, la population qui sont garants de cette authenticité en gardant les coutumes, en gardant les valeurs. La chance de la Roumanie c'est qu'elle reste très attachée à ses traditions, coupée du reste du monde, les Roumains ont fait bloc et on su s'entre-aider, se débrouiller au moment où aucune main ne leur était tendue. C'est un handicap qu'il faut apprendre à transformer en avantage et je crois que les Roumains en ont pleinement conscience. L'État et les structures associatives ont bien évidement leurs rôles à jouer en mettant en valeur les coutumes, le patrimoine, en valorisant les festivals à la télévision, en donnant envie aux gens, en les rendant fiers de leur culture. Dans le long terme, la Roumanie sera gagnante, pari tenu (rires).

 


 

grégory rateau
Publié le 29 juillet 2019, mis à jour le 29 juillet 2019

Flash infos