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MARC MICHIELSEN - “Si je dois citer une ‘success story’, c’est la Birmanie”

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Écrit par Catherine Vanesse
Publié le 13 septembre 2016, mis à jour le 31 juillet 2020

En poste depuis 2012 en tant qu’Ambassadeur du Royaume de Belgique en Thaïlande, en Birmanie, au Laos et au Cambodge, Marc Michielsen s’apprête à rentrer au pays fin septembre après un mandat riche en événements diplomatiques.

A son arrivée à Bangkok en 2012, l’Ambassadeur du Royaume de Belgique en Thaïlande, en Birmanie, au Cambodge et au Laos, Marc Michielsen a eu comme première mission de préparer la visite de Son Altesse Royale le Prince Philippe – aujourd’hui roi – accompagné d’une centaine d’entreprises et de 150 hommes et femmes d’affaires en mars 2013. Une mission économique et socio-culturelle qui a mis en avant les relations bilatérales entre les deux pays. Aujourd’hui, la situation est un peu différente, suite à la prise de pouvoir par la junte le 22 mai 2014, l’Union Européenne a décidé de limiter ses relations bilatérales avec la Thaïlande. Un changement pour le moins important pour un ambassadeur.

Lepetitjournal.com : Quel bilan faites-vous de ces quatre années passées en Thaïlande ?

Marc Michielsen : L’Asie du Sud-Est, c’était nouveau pour moi, dans la mesure où je n’avais jamais eu l’occasion de venir dans la région mis à part des vacances au Cambodge et au Vietnam, il y a près de 25 ans.

Lorsque je suis arrivé, je ne peux pas dire que j’ai eu un choc culturel parce que nous vivons dans un monde de plus en plus globalisé. Durant ma carrière, j’ai surtout travaillé en Europe avec un focus sur l’ex-bloc de l’Est où les pays souffrent encore de ce passé rigide étatique. L’Asie est par définition une région dynamique, où il y a moins de règles et où les gens sont par nature tous entrepreneurs. C’était un contraste très intéressant.

Et sur ces quatre années en Asie, si je dois citer une “success story”, c’est la Birmanie. Avoir une transition telle que le pays a connu après une dictature, ce n’est pas un événement qui arrive tous les jours. Contrairement aux pays de l’Europe de l’Est qui ont connu des révolutions plus sanglantes à la fin des années 1980, début 1990, en Birmanie, ce sont les mêmes personnes qui étaient au pouvoir en 1962 qui ont, entre 2012 et 2015, ouvert le pays, politiquement et économiquement. Une ouverture qui a mené à des élections “fair and free”. C’est un petit miracle et j’espère que le pays va continuer sur cette voie.

A côté de la Birmanie, la Thaïlande a connu plusieurs événements, notamment le coup d’Etat et le référendum controversé, comment avez-vous géré la situation ?

Oui, ces quatre années ont été un peu agitée mais c’était pareil pour mon prédécesseur. C’est inné à la région, il se passe toujours quelque chose. Pour ce qui est de la situation depuis le 22 mai 2014, je ne peux que me référer à la décision de l’Union Européenne qui a décidé de limiter les contacts entre l’UE et la Thaïlande au niveau officiel, ce qui veut dire qu’il n’y a plus de visites officielles de ministres de l’UE en Thaïlande ou de ministres thaïlandais dans les pays membres de l’UE. Il n’est donc pas possible d’avoir des relations bilatérales au plus haut niveau entre la Thaïlande et la Belgique. Pour moi, en tant qu’ambassadeur, fonction qui a justement un rôle bilatéral, la décision de l’UE m'empêche d’aller au plus haut niveau et d'avoir des visites ministérielles. Par exemple, lors d’un accord pour de nouveaux investissements ou pour établir des contacts, avoir la présence d’un ministre apporte plus de crédit, plus de sérieux. Maintenant, je ne peux qu’espérer que le carnet de route du côté thaïlandais sera correctement suivi et que des élections auront bien lieu en 2017.

Du côté des entreprises et des investisseurs, quel impact a eu le coup d’Etat ?

Les réactions ont été très différentes en Thaïlande et en Belgique. D’un côté, il y a ceux qui sont en Thaïlande depuis un moment et qui ont “un peu l’habitude” des coups d’Etat. Ces personnes n’étaient pas vraiment inquiètes. Les questions et les craintes se sont beaucoup plus posées pour ceux qui sont installés en Europe, qui n’ont pas vraiment de connaissances approfondies de la Thaïlande. Les manifestations, le coup d’Etat, le climat d’instabilité, certains incidents avec parfois des morts, tout cela ne créé par une image propice aux intérêts professionnels. La première année après le coup d’état, l’intérêt des entreprises belges pour la Thaïlande était clairement en chute libre.

Il y a des pays où tout le monde veut aller, où toutes les semaines il y a des personnes qui veulent investir ou lancer une nouvelle activité. Et il y a d’autres pays où la conjoncture économique et/ou politique fait que l’intérêt est nettement moindre. J’ai essayé de conserver les atouts que nous avions. La mission de l’ambassade a donc été, avec la chambre de commerce Beluthai et quelques activités diplomatiques de montrer que la Belgique est présente en Thaïlande.

Le fait que la Belgique soit également une monarchie favorise-t-il les relations avec la Thaïlande ?

Tout à fait. Il y a d’une part un lien objectif de par le statut, les deux pays sont des royaumes, un atout qui permet d’ouvrir des portes, d’aider à débuter des relations diplomatiques ou économiques. Et d’autre part, il y a un lien personnel, le roi Baudouin et le roi Bhumibol était des amis personnels, ils se connaissaient, ils ont tous les deux vécus en Suisse. Dans les années 1960, il y a eu beaucoup d’échanges entre les deux pays au plus haut niveau et cela jusqu’au décès du roi Baudouin. Le roi Baudouin et la reine Fabiola sont venus en visite d’Etat mais également en visites privées en Thaïlande. Le roi Bhumibol et la reine Sirikit sont aussi venus en visite d'Etat en Belgique.

Lire aussi : "On peut résumer la nature des relations belgo-thaïes par le mot amitié"

Un mot sur la communauté belge en Thaïlande ?

Il y a 2.800 Belges inscrits auprès de l’ambassade de Belgique en Thaïlande, c’est une communauté qui ne cesse de s’agrandir. La Thaïlande attire autant des retraités qui voient dans le pays un lieu au climat agréable et plus économique qu’en Belgique -ceux-là vivent généralement en dehors de Bangkok. Et puis il y a les “jeunes dynamiques” qui sont à Bangkok, Phuket ou Pattaya.

Pour les expatriés, la Thaïlande est un pays facile. Je pense que les Belges ici n’ont pas autant cet esprit de communauté, la nécessité absolue de se retrouver entre eux pour s’entre-aider ou se rencontrer. C’est différent au Cambodge, où j’ai l’impression que les Belges se rencontrent plus qu’ici.

Il y a la Chambre de commerce, la Beluthai et le Belgian Club qui sont actifs et permettent à la communauté de se retrouver et puis il y a aussi des événements comme le football qui sont fédérateurs.

Tout comme les dégustations de bières ?

La dernière dégustation de bières en juillet dernier, c’était en partie pour la population belge mais aussi et surtout pour un public thaïlandais, je voulais un public hybride pour cet événement. Les Belges aiment la bière et la connaissent, je voulais la faire découvrir à un autre public. Certains collègues me disent qu’on parle toujours de la Belgique comme étant le pays de la bière et du chocolat. Ce qui est le cas, même si le pays a beaucoup d’autres choses intéressantes aussi, c’est un point d’entrée et c’est mieux d’être connu pour nos bières et nos chocolats que si par exemple le pays était spécialisé en planches à repasser, c’est moins sexy!

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Quelle est votre prochaine mission ?

Après huit ans à l’étranger, je rentre en Belgique vers un monde que je connais bien. Et après ces huit ans de relations bilatérales, je reviens à la politique multilatérale. J’ai commencé ma carrière à l’OTAN, à l’UE, j’ai été lié à la présence belge au sein de l’OSCE, une présence que je vais retrouver en tant que directeur de "La direction Politique de sécurité", une direction qui assure la gestion, la promotion, le développement et la coordination de la Politique européenne de sécurité et de défense - PESD. 

Vous êtes content de rentrer en Belgique ?

Je suis un peu comme un militaire, j’accepte les règles. A titre personnel, je trouve que c’est une bonne chose, après huit années à l’étranger de revenir se ressourcer. Au niveau professionnel, je représente mon pays à l’étranger, il faut de temps en temps reprendre connaissance avec le pays, se reconnecter aux réalités.

Qu’est ce qui vous a charmé en Thaïlande ?

C’est une question difficile...

Il y a d’abord la nourriture, j’adore la cuisine thaïlandaise et heureusement qu’il y a des restaurants thaïlandais en Belgique, histoire de ne pas être totalement dépaysé.

Ensuite, je trouve que Bangkok est fascinante, c’est une ville composée de différents niveaux qui vont des grands districts comme Sathorn ou Sukhumvit et puis il y a toutes les petites ruelles plus en retraits qui mériteraient toutes un roman tellement il y a de microcosmes. Je peux passer plusieurs fois à un même endroit et remarquer à chaque fois de nouvelles choses, des détails que je n’avais pas vus ou simplement parce que le lieu évolue. C’est une spécificité que je n’ai pas remarquée dans d’autres grandes villes où j’ai pu aller, comme Moscou par exemple.

Et enfin, il y a la nature. J’espère avoir l’occasion de revenir, dans d’autres circonstances, pour prendre plus de temps pour visiter la Thaïlande.

Propos recueillis par Catherine VANESSE  mercredi 14 septembre 2016
 

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