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« A Montréal, on se sent en sécurité » : le poids des mots des Montréalaises

Montréal est une ville particulièrement attrayante pour les Européens pour de multiples raisons. La culture, la mentalité, les affaires, la nature… Néanmoins, un critère rentre souvent en compte, particulièrement pour les femmes : la sécurité. Nous sommes allés à la rencontre d'expatriées françaises qui peuvent en témoigner.

La rue Sainte-Catherine à Montréal, où les femmes se sentent en sécuritéLa rue Sainte-Catherine à Montréal, où les femmes se sentent en sécurité
Écrit par Madeleine Donnadieu
Publié le 2 août 2023, mis à jour le 3 août 2023

 

Les femmes se sentent régulièrement en danger dans la rue, ce n’est pas une exclusivité. Par ce fait sociétal de domination subie, il n’est pas anodin que les femmes conditionnent leurs quotidiens pour se sécuriser. A la suite de multiples témoignages, Montréal semble détenir ce critère malheureusement encore si précieux : la sécurité. 

 

Montréal : ville sûre pour les femmes 

« Ici à Montréal, depuis que je suis arrivée il y a bientôt quatre ans, j’ai été embêtée trois fois au total. On est loin de ce que vivent les femmes en France », confie Laurie, une expatriée française installée à Montréal. 

En 2022, le magazine français Géo plaçait Montréal à la tête du classement des villes les plus sûres au monde pour les voyageuses seules, faisant ainsi de la métropole francophone du Canada une safe place pour les femmes. En 2018, la police de Montréal a déclaré un taux de criminalité global de 3275 affaires pour 100.000 habitants, un taux comparable à celui noté au Québec (3304), mais de 40 % inférieur au taux enregistré au Canada (5488). La même année, 150 victimes (de sexe féminin) d’infractions sexuelles ont été recensées à Montréal, soit 20 femmes de moins que la moyenne canadienne. De 2009 à 2018, à Montréal, les crimes violents commis contre la gent féminine ont diminué de 6%. 

« Ma femme habitait dans une banlieue difficile de Paris. Elle avait toujours une veste dans son sac pour se protéger des violences omniprésentes. C’est une des raisons qui l’a poussée à rester à Montréal où son quotidien s’est radicalement apaisé à ce niveau là, que ce soit dans la rue ou au travail », raconte Nicolas, un autre expatrié français vivant à Montréal. 

« Je rentre à pied ou à vélo la nuit sans sentiment de danger. Je croise régulièrement des femmes seules également. Je me sens totalement en sécurité dans le centre ville de Montréal contrairement à Paris », appuie Mélanie, française également installée au Québec. 


Une sécurité atteinte grâce à l'action des pouvoirs publics

Une des raisons principales à ce sentiment de sécurité est l'investissement actif des pouvoirs publics de la ville. En effet, les pouvoirs publics prêtent encore trop faible attention à la problématique de la sécurité des femmes dans les villes, et ce même depuis le mouvement Me Too. Selon Marylène Lieber, doctorante en sociologie à l’Université de Versailles-Saint-Quentin,  « les risques qu’elles encourent dans l’espace urbain sont encore largement appréhendés comme des menaces « naturelles », évidentes, que chacune doit gérer individuellement ».

A Montréal, ce n’est pas le cas. Depuis 2004, le Conseil des Montréalaises agit en tant qu’assemblée consultative, à la demande du conseil municipal de la Ville de Montréal ou de sa propre initiative, auprès de l’administration municipale pour tout ce qui a trait à la condition féminine et à l’égalité entre les femmes et les hommes. Il utilise l’analyse féministe intersectionnelle des enjeux pour appréhender les réalités vécues par les Montréalaises. Une active participation des femmes dans la société civile serait-elle la solution pour le bien commun de la vie urbaine ? 

En l’espèce, le Conseil des Montréalaises exerce donc les fonctions suivantes : il fournit, de sa propre initiative ou à la demande du maire ou de la mairesse, du comité exécutif ou du conseil de la ville, des avis sur toute question relative à l’égalité entre les femmes et les hommes, entre les femmes elles-mêmes, à la condition féminine et soumet des recommandations au conseil de la ville; il sollicite des opinions, reçoit et entend les requêtes et suggestions de toute personne ou tout groupe sur les questions relatives à l’égalité entre les femmes et les hommes, à l’égalité entre les femmes elles-mêmes et à la condition féminine; il contribue à la mise en œuvre et au suivi d’une politique d’égalité entre les femmes et les hommes à la Ville de Montréal; et il effectue ou fait effectuer des études et des recherches qu’il juge utiles ou nécessaires à l’exercice de ses fonctions.


Que disent les lois canadienne et française sur la harcèlement de rue ? 

Au Canada, le terme « harcèlement de rue » n'est pas employé dans le Code criminel canadien. Toutefois, l'article 264 du Code criminel dispose qu’il est interdit « d’agir à l’égard d’une personne sachant qu’elle se sent harcelée ou sans se soucier de ce qu’elle se sente harcelée si l’acte en question a pour effet de lui faire raisonnablement craindre — compte tenu du contexte — pour sa sécurité ou celle d’une de ses connaissances  » . 

A titre de comparaison, en juillet 2018, la France a adopté une loi visant à réprimer une forme de harcèlement de rue connue sous le nom d'outrage sexiste. Selon cette loi, l'outrage sexiste est défini comme le fait d'infliger à une personne des propos ou des comportements à connotation sexuelle ou sexiste, portant atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, ou créant une situation intimidante, hostile ou offensante à son encontre. Contrairement au harcèlement, cette notion ne requiert pas de répétition, une seule occurrence suffit pour constituer une infraction.

En avril 2019, le gouvernement a rapporté que 447 amendes avaient été infligées depuis l'entrée en vigueur de la loi en août 2018. Cependant, en 2020, un rapport du SSMSI (Service statistique ministériel de la sécurité intérieure) a révélé que, deux ans après l'application de la loi, 1746 infractions avaient été relevées et que seulement 15% des cas avaient abouti à l'identification et à la poursuite d'un auteur. Ce bilan suscite des doutes quant à l'efficacité de la loi, en particulier auprès des associations engagées contre les violences sexistes. En 2023, l'outrage sexiste ou sexuel aggravé a été élevé au rang de délit, marquant une nouvelle étape dans la lutte contre ce comportement répréhensible face aux manques de répressions. 

Néanmoins, même si Montréal est une ville plutôt très sûre pour les femmes, 65,3 % des habitantes ont rapporté avoir vécu une ou plusieurs manifestations de harcèlement de rue à Montréal en 2021. En France, ce pourcentage s’élève à 81 %. 

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