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ECONOMIE POLOGNE - Ralentissement économique et difficultés budgétaires

Écrit par Lepetitjournal.com Varsovie
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 22 juillet 2013

 

Certains médias et économistes le clamaient depuis le début du printemps : avec le ralentissement économique et la baisse des recettes, le budget 2013 de l'État polonais était devenu irréaliste. Le gouvernement l'a reconnu le 16 juillet en annonçant un trou de plus de 24 milliards de zlotys par rapport au déficit initial de 35,6 milliards. Pour financer ce trou, la Pologne va donc augmenter son déficit de 16 milliards, l'amenant ainsi à un niveau de 51 milliards encore jamais atteint, et également chercher des économies à hauteur de plus de 8 milliards. Le ministre des finances Jacek Rostowski a donc fait savoir qu'il allait demander au parlement polonais de suspendre pour la période 2013-2014 l'application de la règle d'or budgétaire qui interdit à l'État d'accroître son déficit d'une année sur l'autre si le déficit des finances publiques dépasse 50% de la valeur du PIB, et qui l'obligera même à des coupes drastiques si ce déficit atteint 55%. 

Marek Belka, président de la Banque nationale de Pologne (NBP), considère que la volonté du gouvernement de Donald Tusk de vouloir rendre le budget plus réaliste est encourageante. Pour lui, la responsabilité de ce dérapage est à rechercher dans la mauvaise conjoncture européenne et mondiale. Pourtant, fait remarquer le syndicat des employeurs Lewiatan, les exportations polonaises se portent bien grâce à un zloty qui a perdu de sa valeur face aux principales monnaies étrangères depuis le début de la crise en 2008. C'est la consommation en berne et les investissements en forte baisse qui sont les principales causes du ralentissement économique et qui ont poussé en juin la Banque mondiale à revoir à la baisse ses prévisions de croissance 2013 pour la Pologne, à 1 % seulement au lieu de 1,5%. À titre de comparaison, juste avant le début de la crise mondiale, en 2007, l'économie polonaise a enregistré une croissance annuelle de 6,7%, puis des taux de croissance approchant les 4 % l'an lors du rebond de 2010-2011. Des résultats somme toute fort honorables dans le contexte très morose du continent européen. Et c'est plutôt à la coalition précédente dirigée par le PiS en 2005-2007 que M. Belka reproche de n'avoir pas mis à profit la forte croissance dont elle a bénéficié pour s'attaquer suffisamment aux déficits chroniques des finances publiques. 

Pour le ministre Rostowski, la recherche d'économies sera bénéfique sur le long terme tandis que l'accroissement du déficit budgétaire devrait stimuler l'économie au moment où elle en a le plus besoin. La Pologne ne semble d'ailleurs pas inquiéter outre mesure les investisseurs et elle n'a pour le moment aucun problème à se financer sur les marchés grâce à des taux d'intérêt plus élevés que ceux de la Zone Euro et des États-Unis même si les taux polonais sont eux aussi à un niveau historiquement bas. Il faut donc espérer que l'annonce d'un déficit des finances publiques pour cette année à hauteur de 4,4% du PIB au lieu des 3,9% prévus à l'origine ne fera pas changer les investisseurs d'avis.

L'opposition, quant à elle, annonçait depuis plusieurs mois déjà que le budget allait devoir être révisé et qu'il avait été construit dès le départ sur des prévisions excessivement optimistes. Rejointe par certains économistes, elle accuse aussi le ministre des Finances de faire preuve d'une grande créativité pour cacher une partie importante du déficit. On a parlé il y a quelques années de la création de fonds spéciaux comme le fonds d'investissements routiers dont l'unique objectif aurait été, d'après l'opposition, de ne plus compter certaines dépenses dans le budget de l'État. Il est aussi question des emprunts contractés par la sécurité sociale polonaise, le ZUS, auprès des banques commerciales, pour financer les prestations de retraite, des emprunts qui atteindraient aujourd'hui des niveaux inquiétants. Le président du Centre Adam Smith, un groupe de réflexion libéral, prétend même que le ministre Rostowski devrait recevoir un prix pour son habileté à manipuler Excel et à y faire depuis des années des opérations qui lui permettent d'améliorer la situation économique sur le papier, tandis que Krzysztof Rybi?ski, ancien vice-président de la NBP, parle de comptabilité créative du ministère des Finances à une échelle inédite dans l'histoire du pays.

Le président actuel de la NBP est néanmoins d'un autre avis. Marek Belka considère que la situation économique et budgétaire de la Pologne devrait s'améliorer dès l'année prochaine et que le gouvernement de Donald Tusk ne devrait pas avoir trop de difficultés à trouver les 8 milliards d'économies annoncés. Les contribuables se réjouiront sans doute, au moins pour le moment, que le ministre des Finances n'envisage pas de nouvelles augmentations d'impôts malgré les difficultés budgétaires.

Olivier Bault (www.lepetitjournal.com/varsovie) - lundi 22 juillet 2013

Photo : stock Corbis

 

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Publié le 21 juillet 2013, mis à jour le 22 juillet 2013
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