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La Suède, l’Eldorado de la monnaie dématérialisée

À l’heure où les débats sur le bitcoin s’intensifient, la Suède semble s’afficher comme pionnier sur ce point. Billets et pièces s’effacent dans la société, laissant place à de nouveaux systèmes de paiement.

payment digital via swish en suèdepayment digital via swish en suède
Paiement par Swish - Crédits : Lieselotte van der Meijs/imagebank.sweden.se
Écrit par Hugo Messina
Publié le 3 juillet 2023, mis à jour le 4 juillet 2023

Point historique sur la monnaie en Suède

Depuis la fin du 19ème siècle, le royaume utilise la couronne, krona, qui est venue remplacer le riksdaler. Comme ses voisins scandinaves, sauf la Finlande, les Suédois ont refusé l’euro par référendum lors de sa mise en place dans l’Union Européenne. D’années en années, les sondages semblent souligner une tendance de la majorité des habitants à vouloir conserver la couronne, symbole du pouvoir souverain du pays.

Théoriquement, la couronne suédoise se divise en pièces et billets comme la plupart des monnaies dans le monde. Mais une large baisse de leur présence sur l’ensemble du territoire se fait ressentir depuis quelques années. Par exemple, la Sveriges Riksbank, Banque Centrale suédoise, annonçait en 2018  que les billets en circulation ne représentaient plus que 1% du PIB.

Comme en France, l’utilisation déclinante des pièces a conduit à ne plus frapper que les pièces de 1, 2 et 5 couronnes depuis 2016, et démonétiser les autres depuis 1972.

Concernant les billets, leur usage est plus courant. Depuis 2016, les sommes en circulation sont de 20, 50, 100, 200, 500 et 1 000 couronnes. Ces nouveaux billets, dont le design a été créé par Göran Österlund, représentent d’un côté de grandes figures du pays, comme Greta Garbo ou Astrid Lindgren, et de l’autre chacune des régions.

 

La monnaie « invisible », nouvelle tendance ?

C’est un des premiers conseils qu’un local vous dira : ne pas encombrer son porte-monnaie en arrivant en Suède. En effet, la couronne physique est de moins en moins monnaie courante. Une majorité écrasante des commerces, restaurants, et autres lieux d’échanges se sont adaptés aux nouvelles mœurs. Selon les données de la Banque Centrale de Suède, quatre transactions sur cinq seraient réalisées par carte.

Il en va de même pour les réseaux de transports publics. Depuis peu, en plus de pouvoir régler directement par carte bleue sans contact, il est possible d’acheter son ticket via une application sur son téléphone, et de simplement scanner un QR Code pour entrer dans le métro ou le bus.

D’autres initiatives montre la volonté du gouvernement de développer les échanges dématérialisés. Récemment, l’État a annoncé le lancement d’e-Krona, une cryptomonnaie 100 % suédoise. C’était alors en février 2020, et la phase test devait durer une année entière, mais avec le Covid-19, celle-ci a été rallongée. En préparation depuis 2016, la Banque Centrale suédoise souhaite que cette e-Couronne soit un complément de la monnaie traditionnelle à destination du grand public. Basé sur la technologie du blockchain, elle permettrait, grâce à une application mobile, de faire des paiements, dépôts et retraits, et de disposer d’un portefeuille électronique. À l’heure actuelle, peu de pays ont tenté le pari de la cryptomonnaie nationale, comme la Chine avec le crypto-yuan. Bien qu’aucune monnaie virtuelle ne soit encore officiellement reconnue, la question devrait devenir centrale dans les décennies à venir. La Suède compte bien être novatrice sur l’utilisation d'outils numériques monétaires.

Enfin, comment parler de paiement dématérialisé sans parler de Swish. Cette application, lancée par les plus grosses banques du pays en 2012, a simplifié cette manière de payer. Ainsi, il n’est pas rare, voire même commun, de régler un bon nombre de choses dans sa vie quotidienne avec Swish. L’exemple courant est celui des marchés aux puces, mais on relève aussi quelques utilisations plus originales, comme avec la donation digitale lors des quêtes dans les églises, ou les virements acceptés par certains sans domicile. Ses usages sont aussi assez utiles, notamment lorsqu’il est question de diviser la note entre convives au restaurant ou pour des courses communes.

Une dizaine de banques travaillent avec Swish, permettant à l’ensemble de la population d’utiliser l’application. Le processus est d’ailleurs assez facile, puisque le seul numéro de téléphone suffit à se connecter. Seule barrière : il faut disposer d’un BankID, d’un personnummer et d’une connexion internet pour pouvoir jouir de ces services.

 

Les avantages et les inconvénients en passant au digital

Comme toute chose, il y a des points positifs et négatifs à choisir une économie dénuée de toute monnaie physique.

Les bons points sont tout de même assez nombreux. D’abord, la transition vers la monnaie virtuelle a eu pour effet global de revoir à la hausse les marges des commerçants, influencent sur les prix à la baisse pour les consommateurs. Cet effet est dû au fait que le coût global d’un paiement par carte est moins élevé qu’un paiement cash.

De plus, une stimulation de l’économie suédoise découle de ce nouvel équilibre. Les scientifiques insistent sur l’effet psychologique d’un paiement dématérialisé, qui inciterait les consommateurs à dépenser plus qu’en ayant des espèces, car il n’y a pas de visualisation concrète de son budget.

Enfin, d’autres effets collatéraux ressortent, comme la réduction des vols à la sauvette ou à l’arraché, ou encore le développement de start-up dans ce domaine.

Pourtant, des désavantages existent bel et bien. Pour les personnes n’utilisant pas ou peu les nouvelles technologies, difficile de s’en sortir dans une société tendant vers le numérique. C’est par exemple le cas de certaines personnes âgées, peu habituées à payer « à distance ». Pour encourager la préservation du liquide, le gouvernement a ainsi proposé une loi le 1er janvier 2020, visant à donner la possibilité aux suédois de retirer de l’argent dans un rayon de 25 kilomètres autour de leur domicile. Entre d’autres termes, cette mesure devrait favoriser la création de nouveaux distributeurs, sous peine de sanctions financières pour les banques.

Les experts citent aussi souvent les risques liés aux cyberattaques et au piratage d’éléments privés. Plusieurs exemples récents témoignent que ce danger est réel ; l’État ne peut pas se permettre de mettre en péril les données de ses administrés.

Hugo Messina
Publié le 3 juillet 2023, mis à jour le 4 juillet 2023

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