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CULTURE - L’Eldorado colombien : du rite au mythe

Écrit par Lepetitjournal Bogota
Publié le 1 juin 2017, mis à jour le 7 février 2024

C'est un rituel indigène qui a donné naissance au mythe de l'Eldorado. Une légende supposant promettre richesse à quiconque trouverait la source d'un trésor caché ne peut qu'attiser les convoitises et menant les aventuriers aux expéditions et tentatives les plus folles ! A seulement 75 km au nord de Bogotá, le site est aujourd'hui un site apprécié pour ses excursions. 

L'Eldorado colombien : un rite sacré chez les Muiscas

Si vous êtes déjà allés au musée de l'or de Bogotá, vous avez déjà pu admirer une représentation de ce rituel : Le radeau Muisca. Cet objet en or retrouvé à 80 km de Bogotá montre un radeau sur lequel se tient un chef de la tribu Muisca entouré d'autres personnages.

Ce remarquable travail d'orfèvre façonné entre le XIème siècle et le XVIème siècle raconte la cérémonie d'intronisation du Zipa : le chef des Muiscas. Ce jour là, le Zipa était recouvert d'or des pieds à la tête d'où le nom « Eldorado », littéralement : « le doré ». Il était ensuite emmené par un radeau au milieu du lac sacré de Guatavita.

Accompagné de prêtres, il déversait dans le lac des objets en or et des émeraudes avant de s'y baigner pour se purifier. C'est cette cérémonie qui a engendré une cruelle ruée vers l'or lorsqu'elle est parvenue aux oreilles des conquistadors espagnols.

Photo : Radeau de Guatavita, Musée de l'or, Bogotá, Colombie

L'Eldorado colombien : un trésor convoité par l'ancien monde

En 1537, Gonsalo de Jiménez de Quesada (explorateur et conquistador espagnol) monta une expédition de 800 hommes. Ils partirent de Santa Marta et remontèrent le cours du fleuve Magdalena. C'est là qu'ils rencontrèrent les Muiscas. Ils s'aperçurent que ce peuple avait une grande quantité d'or et qu'il n'hésitait pas à en donner. Ils décidèrent donc de changer d'itinéraire et de se rendre sur le territoire Muisca à l'est du Magdalena dans les massifs montagneux. Lorsqu'ils arrivèrent chez ces indigènes, ils n'étaient plus que 166 à avoir survécu au voyage tant les conditions étaient rudes. « Heureusement ! », me direz-vous plus tard !

Ils purent observer que ce peuple vivait bien, même très bien. Leur terre était fertile et leur société prospère. D'ailleurs, des recherches récentes sur des ossements de la tribu ont démontré qu'il n'y avait aucun signe de malnutrition et que leur espérance de vie était bien au de delà de celle des européens de l'époque. Les conquistadors découvrirent aussi que même les familles Muiscas les plus pauvres possédaient de l'or. Autant d'éléments qui suggérant que ces indigènes avaient de l'or sur leur territoire. Si les Muiscas donnaient leur or et s'offrait même le luxe de le jeter dans le lac, c'est qu'ils devaient posséder une mine où ce métal coulait à flot !

L'Eldorado colombien : entre folies et désillusion

Pendant plus de 3 ans, les espagnols arpentèrent leur terre afin de trouver la mine, mais même s'ils trouvèrent énormément d'or enterré ou caché dans des grottes, la mine restait introuvable. Et pour cause ! De récentes études ont démontré que l'or ne pouvait pas venir du territoire Muisca, puisqu'il venait directement de la rivière de la Magdalena. L'or n'était donc pas sur leur terre.

Ce qui a également échappé aux conquistadors est que la société Muisca était fondée sur l'empire du sel. Les indiens possédaient une source d'eau salée importante, un trésor inestimable qui leur donnait le monopole dans cette région située à près de 500 km de la mer. Les briques de sel qu'ils fabriquaient étaient leur monnaie d'échange avec les peuples voisins. L'or n'avait aucune valeur pour eux. Ce métal précieux que les Espagnols retrouvaient sous la forme de petite figurines appelées Tunjos n'étaient en fait « que » des offrandes pour les divinités. Et s'ils en dénichaient un peu partout en petite quantité, c'est parce que les dieux étaient partout, selon les croyances des Muiscas.


Photo : Laguna de Guatavita, Sesquilé, Cundinamarca, Colombie


Faute de mine, il y eut plusieurs tentatives de vider le lac, dont celle du frère de Quesada en 1540 mais aussi d'Antonio Sepulveda. En 1572, muni d'un permis, il entreprit de percer la crête qui l'entourait pour que l'eau s'en évacue. Il entama des travaux colossaux, réduisant les Muisca en esclave et en les forçant à creuser leur lieu sacré. Au fur et à mesure de la descente des eaux, ils retrouvèrent or et émeraudes, ce qui les encouragea dans leur quête. Le chantier tourna au drame lorsque le barrage s'effondra sur des centaines de Muiscas, les emportant dans les flots. Ce fut encore une perte considérable pour ce peuple qui avait déjà été pillé, maltraité, tué mais aussi décimé par les maladies propagées les Espagnols, telles que la grippe ou la variole. 

Entre temps, la légende de l'Eldorado s'est rependue et au fil des siècles et des récits des explorateurs, les recherches se sont étendues à d'autres régions et pays. L'« El Dorado », l'« Homme doré », attisa tant de convoitise qu'il en devint non pas une mine d'or mais une cité d'or. Et même si certains conquistadors, avides de richesse, sont revenus chargés ce précieux métal comme Francisco Pizzaro avec l'or des Incas, d'autres en sont revenus bredouille, et d'autres encore n'en sont jamais revenus ! Qui sait ? Peut-être ont-ils trouvé l'Eldorado et l'ont-ils gardé secrètement pour eux.

Pascale Girard Oudin, www.lepetitjournal.com/bogota, jeudi 1er juin 2017

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Publié le 1 juin 2017, mis à jour le 7 février 2024

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