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Comprendre les licenciements en Allemagne : vos droits, recours et ressources

En tant qu’employé·e en Allemagne, il est essentiel de connaître les règles en matière de licenciement, ainsi que les protections juridiques existantes.

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© Alex Kotliarskyi - Unsplash
Écrit par Jean-Baptiste Abel | avocat (Rechtsanwalt)
Publié le 20 septembre 2023, mis à jour le 1 février 2024

Les licenciements sont soumis à une série de réglementations strictes visant à protéger les droits des employé·e·s. Jean-Baptiste Abel, avocat (Rechtsanwalt) à Berlin-Kreuzberg précise ce que chaque employé·e devrait savoir lorsqu'il ou elle est confronté·e à un licenciement en Allemagne.

 

Vous n'êtes pas seul·e

À partir du moment où votre employeur·se met fin au contrat de travail (les mots-clés à guetter sont “Kündigung” et “kündigen”), il est fortement recommandé de faire appel à un conseil juridique. Comme la réception de la lettre de licenciement marque le début d’un délai de trois semaines, il est important d'agir le plus rapidement possible.

Si votre entreprise dispose d'un comité d'entreprise (Betriebsrat), celui-ci est également une bonne source d'information et de soutien. Vous pouvez demander à être assisté·e par un membre du comité d'entreprise dans le cas où votre employeur·se vous convoque à un entretien pour discuter de votre avenir au sein de l'entreprise. Profitez-en !

 

La loi sur la protection contre les licenciements est là pour vous protéger

Dans les entreprises de plus de dix salarié·e·s, les employé·e·s sont protégé·e·s après six mois d'ancienneté par la loi sur la protection contre les licenciements (Kündigungsschutzgesetz, KSchG). L'employeur·se ne peut alors licencier légalement que si le licenciement est justifié par un motif reconnu par la loi. Un tel motif de licenciement peut être :

  • Motifs liés à l'entreprise : par exemple, l'entreprise se réorganise, ce qui entraîne la suppression de votre emploi.
  • Motifs liés à la personne : par exemple, un·e chauffeur de camion perd son permis de conduire et ne peut donc plus être employé·e ou un·e employé·e est en incapacité permanente et ne peut plus accomplir son travail.
  • Motifs liés au comportement : Le ou la salarié·e viole une obligation dans le cadre de son contrat de travail, par exemple, absence non excusée ou vol de biens de l'entreprise.

Cela rend beaucoup plus difficile pour l'employeur·se de prononcer un licenciement juridiquement valable. La question de savoir si un licenciement est justifié est décidée après un examen global de toutes les circonstances du cas individuel et une analyse individuelle des intérêts respectifs. Chaque licenciement doit donc être examiné individuellement.

En général, l’employeur·se n’est pas obligé·e de nommer le motif du licenciement dans la lettre même.

 

Vous avez trois semaines pour introduire une action en justice

Tout licenciement effectué par l'employeur·se peut être soumis au tribunal du travail (Arbeitsgericht) afin de vérifier sa légalité. Le tribunal déterminera alors si le licenciement est efficace et justifié ou si le licenciement est nul et par conséquent que votre employeur·se sera obligé·e de vous réembaucher à votre poste. Souvent, l'employeur·se et le ou la salarié·e profitent de la procédure judiciaire pour négocier une indemnité en échange de l’acceptation du licenciement.

Mais attention : la lettre de licenciement doit impérativement être contestée dans un délai de trois semaines à compter de sa réception, c'est-à-dire du moment où vous l’avez en main sur papier ou que vous l'avez reçue dans votre boîte aux lettres, sinon elle sera irrémédiablement considérée comme valable et justifiée. Votre employeur·se n'aura alors plus aucune raison de négocier avec vous les conditions de votre départ.

Une fois la plainte déposée, c'est à l'employeur de prouver que le licenciement était justifié. C'est donc à lui de montrer au tribunal qu'il a appliqué toutes les dispositions de la loi sur la protection contre le licenciement. Même de petites erreurs formelles peuvent avoir pour conséquence que le licenciement n'était pas justifié et donc sans effet. Ces erreurs sont plus fréquentes qu'on ne pourrait le croire, même dans de grandes entreprises dotées d'une grande expertise et de beaucoup d'expérience. Pour négocier une indemnité de licenciement, vous êtes donc en bonne position.

 

Vous n'êtes pas obligé·e de signer quoi que ce soit

Souvent, l'employeur·se demande une signature pour confirmer que le ou la salarié·e a bien reçu son préavis. Vous n'êtes pas obligé·e d'apposer cette signature.

Il est possible que votre employeur·se vous propose, en même temps que votre licenciement, un contrat de rupture conventionnelle prévoyant une indemnité. Avant de signer ce contrat de rupture, demandez conseil à un·e professionnel·le. Ne laissez pas votre employeur·se vous forcer la main. Rien ne justifie une signature sur le champ, dans l'urgence. Demandez un délai de réflexion, prenez le contrat avec vous et lisez-le attentivement et calmement en dehors de cette situation tendue.

En acceptant un contrat de rupture, vous risquez d'être pénalisé·e par rapport à l'Agence fédérale pour l'emploi, qui peut refuser de vous verser des allocations chômage pendant une période pouvant aller jusqu'à douze semaines.

Enfin, comme dans toute situation, ne signez un document que si vous en comprenez entièrement le contenu.

 

Demandez une indemnité de licenciement

Dans la plupart des situations, le droit du travail allemand ne prévoit aucune indemnité de licenciement fixe. Soit le licenciement est légal et l'employeur·se n'a pas à payer d'indemnité de licenciement, soit le licenciement est illégal et la relation de travail se poursuit sans interruption, et, dans ce cas également, il n'y a pas de droit à une indemnité de licenciement. Uniquement dans le cas où l'employeur·se et le ou la salarié·e conviennent mutuellement de mettre fin à la relation de travail, iels se mettent d’ordinaire d'accord sur une indemnité de licenciement en compensation de la perte d'emploi.

L'indemnité de licenciement est négociée librement et varie en fonction des probabilités de succès de l'action en justice pour licenciement abusif.  À titre indicatif, la loi propose la moitié d'un mois de salaire brut par année de travail. Pour un licenciement après deux ans dans l’entreprise, cela correspond donc à un mois de salaire de prime de licenciement. Ce n’est cependant que la base pour une négociation individuelle. Selon les circonstances, l'indemnité de licenciement peut être nettement supérieure ou inférieure à cette référence.

 

Attention à votre période de préavis

Normalement, un licenciement ne peut être prononcé que dans le respect d'un délai de préavis. Les délais sont généralement indiqués dans votre contrat de travail, les délais minimum légaux sont indiqués dans l'article 622 du Code civil allemand (Bürgerliches Gesetzbuch, BGB). Pendant cette période, la relation de travail se poursuit normalement : il vous faudra continuer à exercer votre activité, votre employeur·se devra continuer à vous payer.

Parfois, l'employeur·se accorde un congé en même temps que le licenciement, c'est-à-dire qu'iel renonce à votre prestation de travail, mais continue à payer votre salaire.

Ce n'est que dans des cas exceptionnels, par exemple en cas de violation grave des obligations du ou de la salarié·e, que l'employeur·se peut résilier le contrat sans préavis. Dans ce cas, la relation de travail prend fin immédiatement.

 

Pensez à votre demande d'allocation chômage

Toute personne ayant cotisé à l'assurance chômage pendant au moins un an a droit à des allocations chômage (Arbeitslosengeld) après un licenciement. Toute personne ayant reçu une lettre de licenciement doit d'abord s'inscrire comme demandeuse d'emploi dans les trois jours (par téléphone, en ligne, par écrit ou en personne). Au plus tard le premier jour de chômage, vous devez également vous inscrire comme sans emploi - généralement en personne - auprès de l'Agence fédérale pour l'emploi (Bundesagentur für Arbeit).

 

Soyez confiant·e et faites respecter vos droits

Même si un licenciement est une situation sérieuse et pénible, sachez que vous n'êtes ni seul·e ni sans droits. Avec le soutien adéquat, vous réussirez à surmonter cette épreuve. Gardez la tête haute, restez confiant·e et n'hésitez pas à réclamer le respect de vos droits : ils sont là pour ça. Pour en savoir plus et discuter de vos options concernant un licenciement, il vous suffit de me contacter ou de réserver votre rendez-vous.

 

 

Jean Baptiste Abel
Publié le 20 septembre 2023, mis à jour le 1 février 2024

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